il faut de tout pour faire un monde ☆ haisley

il faut de tout pour faire un monde ☆ haisley JKHT9HW

il faut de tout pour faire un monde
crédit/ tumblr ✶ haisley

On ne peut pas vraiment dire que Manhattan colle au quartier que j’ai l’habitude de fréquenter. Pourtant, je viens de plus en plus souvent ici : pour les cours, les matchs et les entraînements. Un peu par obligation alors, me diriez-vous. Mais pas seulement.. Les filles de l’équipe sont les personnes que je fréquente le plus et comme nous venons toutes d’horizons bien différents, boursières ou non, il arrive que certaines proposent que l’on se rejoigne dans des bars ou boîtes de nuit huppées. Je n’ai pas forcément la tête de la fille qu’on laisse entrer dans se poser de questions, mais il faut croire que je suis toujours bien accompagnée pour ne pas en arriver à l’étape où on me refoule. Avec les années, j’ai aussi diversifié ma garde de robe, histoire de passer un peu plus inaperçue dans ce genre d’endroit, mais ces vêtements se comptent sur les doigts d’une main puisque ce n’est pas dedans que je suis la plus à l’aise. Ce soir, c’est la gardienne qui a proposé de venir ici, pour son anniversaire, et comme elle proposait de payer une tournée, je ne pouvais clairement pas refuser. Quand on vit dans le Bronx, on ne peut pas vraiment se permettre de refuser des verres à plusieurs centaines de dollars — le seul inconvénient, c’est qu’à moins d’une autre tournée soit gracieusement offerte, je peux rarement suivre avec l’argent que ma mère accepte de me donner. Visiblement d’humeur généreuse, c’est bien pour un nouveau verre « à l’honneur de ses vingt-et-un ans » que je me dirige au bar. Ici, ils ne semblent pas très regardant sur la carte d’identité — au point même que la fausse que j’ai dans mon sac suffit. Je suppose que tant qu’ils ont l’argent à la fin de la soirée, ils s’en fichent un peu. Le serveur me tend mon verre et au moment où je m’apprête à retourner vers la table où se trouve mes amies, je tombe sur un visage familier. « Mais.. ne serait-ce pas madame parfaite ? » Il ne faut pas se méprendre, si j’avais pu éviter Hailsey aujourd’hui, je l’aurais fait. Nous faisons les mêmes études et pourtant, nous sommes bien différentes. Elle est issue de Manhattan, de ce luxe et de tout ce qui va avec. À côté, selon elle, je suis presque une pouilleuse. « Comme quoi, de temps à autres, la haute et les gens de bas étages fréquentent les mêmes endroits. » Il ne faut peut-être pas que je prenne trop la confiance, surtout avec elle, il serait quand même dommage qu’elle appelle un videur pour me mettre à la porte — même si ma présence ici est tout à fait légitime.

w/ @calliope martinez

( OOTN ) Le poison s'enfonçait insidieusement dans ses veines. Une douce brûlure anesthésia sa gorge, alors que cette saveur douce-amère caressait ses papilles en attisant l'effervescence. Les prunelles pétillant dans le noir, elle admirait le tableau singulier de ces mille et un noctambules entrelacés. Les lascifs se déhanchaient sur le rythme sensuel d'une mélodie espagnole et lui offraient une œuvre contemplative dont elle ne se lassait pas. Ils étaient beaux et imparfaits. Leurs mouvements irréguliers ressemblaient à une danse qu'ils avaient longtemps répétée, mais elle jurait la regarder pour la première fois. Les corps s'effleuraient avec une intensité qui laissait des traces, qui embrasait leurs peaux au moindre contact. La nymphe se damnait de ne pas faire partie de ce spectacle. Haut-perchée dans cette tour d'ivoire qui était la sienne, elle observait les heureux et les damnés de ses onyx épanchés. Ils n'étaient que des ombres et des silhouettes dissimulées sous les néons ou des points insignifiants auxquels elle ne prêtait attention que pour se divertir. Un sourire se dessina sur ses lèvres rosées, imbibées de sucre et étincelant sous l'humidité de l'ambre qu'elle avait ingurgité. Féline, elle s'extirpa de la représentation se jouant sous ses yeux et vida le cristal qu'elle faisait chanter de sa bague entre ses fins doigts.

Ses talons heurtèrent le sol silencieusement. Meurtre sous les musiques latines qui défilaient et dont l'écho l'appela jusqu'au bar, elle se dirigea vers cette étendue de bois vernie. Haisley filait entre ces inconnus dont elle reconnaissait seulement quelques visages et déposa son verre vide face à celui qui avait su éveiller son enthousiasme. Une nouvelle esquisse de circonstance lorsqu'un liquide aux nuances nacrées apparut devant elle et, alors qu'elle s'apprêta à plonger son âme dans cet océan écru, une voix reconnaissable froissa sa perdition. Elle se retourna, laissant ses boucles brunes voltiger et retomber en cascade sur ses épaules dénudées. « Calliope. » La naïade glissa ses ébènes sur cette enfant de la nuit qu'elle avait difficilement supporter durant leurs séances de tutorat. De haut en bas, de bas en haut, elle la toisa pour finalement s'adoucir et tremper ses lippes dans son ambroisie. Elle était surprise de la croiser là, entre ces quatre murs privatifs dédiés aux plus fortunés. « Tu ne t'es pas trompée d'étage d'ailleurs ? » Cet air hautain plaqué sur le visage pendant quelques secondes, alors qu'elle finit par laisser échapper un rire moqueur. Taquin le soleil qui brillait au crépuscule. Leurs deux mondes entraient finalement en collision. L'éternel combat entre la gamine des rues et la princesse des hauts quartiers, mais elles n'étaient ni l'une ni l'autre ces clichés qu'elles aimaient se rabâcher. « Qu'est-ce que tu fais ici ? Je pensais que tu détestais ce genre d'endroit. » Elle arqua un sourcil, amusée. Elle était désormais loin cette étudiante studieuse que la plus jeune avait connue durant l'année, un peu trop sévère et enfermée dans cette sphère empuantie qu'elle désirait maintenant fuir. Les ténèbres cachées dans chaque recoin, désespérément prêtes à surgir et à s'immiscer en elle pour lui rappeler tous ces secrets, tous ces mensonges auxquels elle faisait face à présent. Non, ce soir, Haisley était là pour oublier. Ce soir, elle voulait s'amuser.

il faut de tout pour faire un monde
crédit/ tumblr ✶ haisley

Dans cet endroit, rares sont les personnes comme moi. Mais il faut croire qu'aller à Columbia et faire partie de l'équipe de football féminine m'a aidé à gravir certains échelons. Des échelons qui ne collent pas forcément à mon quotidien, mais je suppose que parfois, se retrouver dans une parenthèse enchantée n'est pas désagréable – surtout quand il y a des boissons offertes. Cependant, cela a aussi quelques désavantages, notamment lorsque ma route se retrouve à croiser celles d'autres étudiants. Des étudiants que j'ai l'habitude de voir en cours et que je n'affectionne pas particulièrement. Haisley, par exemple. Sans vraiment savoir pourquoi, dès notre première rencontre, elle m'a catégorisé comme quelqu'un qu'elle ne pouvait pas fréquenter et malgré les nombreuses fois où nous nous sommes retrouvées pour travailler ensemble, c'est resté. Je pense que je suis du genre à être gentille, mais quand on me cherche et qu'on me montre par A + B qu'on ne m'aime pas, alors je suis le mouvement. Et puis, si ça s'est fait si naturellement, alors peut-être qu'il y a une raison. Peut-être qu'en dehors des couloirs de l'université, nous n'étions pas faites pour nous entendre. Peu importe les mondes dans lesquels nous avons grandi. Très vite, Haisley fait du grand Haisley et si je m'en voulais d'avoir une telle relation avec ma tutrice, ce sentiment est balayé – je ne vais quand même pas me faire marcher dessus, sans rien dire. « Pourquoi ? Selon toi, ma place est un peu plus proche des enfers ? » Sur la piste de danse qui se trouve en contrebas, loin des carrés VIP que la brune a sûrement l’habitude de côtoyer. D’ailleurs, je me demande s’il y a vraiment un intérêt à venir ici, si c’est seulement pour s’asseoir et descendre des verres – mais ce n’est pas le sujet de conversation pour l’instant et la manière dont elle dépense son argent ne me regarde pas. Sans grande surprise, la jeune femme rebondit sur la phrase qui s’est échappée de mes lèvres pour m’interroger sur ma présence ici. « Il faut croire qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Et puis, j’ai des amis qui semblent apprécier l’endroit, alors je devais au moins essayer. » En réalité, je suis ici juste pour elles. Pas pour l’endroit. Je n’ai pas besoin d’être quelque part pour savoir ce que je vaux ou qui je suis. Mais ça, ce n’est pas donné à tout le monde. « Tu es toute seule ? Je pensais que les gens comme toi ne se déplaçaient jamais sans bouffons. » Comme les bouffons du roi. De la reine, ici en l’occurrence. Les vacances étant bientôt terminées, je vais très vite retrouver ce charmant visage au quotidien. Alors ce soir, peut-être que je devrais simplement passer mon chemin et faire comme si je ne l’avais jamais croisée – cette idée lui plairait certainement. Néanmoins, je suis presque sûre que si j’avais récupéré mon verre et que je l’avais ignoré, ça me serait retombée dessus plus tard : les gens comme moi ne peuvent qu’être malpolis.

Dim 3 Sep 2023 - 12:17

w/ @calliope martinez

L'or nacré incendiant ses veines et dont les bulles pétillaient joyeusement sur ses papilles lui réchauffait le corps. Son palpitant battait la chamade et lui promettait de tomber amoureux ce soir, d'une danse passagère ou d'une silhouette inconnue, des couleurs accrochées aux murs, d'une chanson dont elle ne retiendrait que les mots. Le soleil irradiait par tous les pores de sa peau et son sourire étirait ses lèvres nimbées d'un rose naturel. Ses prunelles regardait l'intrigante naufragée qui s'était aventurée loin de chez elle ce soir. Et elle était venue la chercher dans cette foule d'étrangers. Ses cheveux ébènes mal articulés et ce regard noir intensifié par les lumières tamisées coloraient cet esprit sauvage qui l'animait. « C'est si joliment dit... » Une esquisse peinte sur ses lippes sucrées, mêlant l'amusement à la provocation, Haisley appréciait cette joute verbale dans laquelle elles semblaient avoir plongé. Elle était légère, détendue et lui permettait d'oublier les problèmes auxquels elle était venue échapper. Loins étaient les jours où elle aurait préféré ne l'avoir jamais rencontrée, où elle avait essayé de l'échanger contre d'autres élèves moins futés. Calli était différente, libre et indomptable. Elle cassait les codes et glissait entre les mondes, en tirait probablement le meilleur parti. Elle l'enviait pour ça. Intéressée, elle arqua un sourcil, curieuse. « T'en dis quoi finalement ? Ca te plait ? » Spontanée, elle espérait secrètement avoir finalement trouvé un point commun avec l'étudiante. Ce soir, tout était illusoire et elle se permettait de rêver plus que de raison. L'âme pansait ses blessures et le coeur tournait, tournait, pour tout oublier.

Un haussement d'épaules pour balayer cette idée et la solitude comme la seule amie sincère qu'elle supportait encore. L'effigie se pinça les lèvres. Ses ébènes riaient déjà, mais elle ne put retenir la phrase qui lui échappa. « Si tu n'en vois pas autour de toi, c'est peut-être parce que c'est toi, chérie. » Pique brûlante, enivrante. Sans aucune douleur ni animosité pourtant. La plus jeune était tombée dans son propre piège, mais elle n'hésita pas à lui tendre la main parce qu'elle n'avait aucune envie de se disputer. Pas encore, pas ce soir. « Je t'offre un verre ? » Lui demanda-t-elle finalement comme une excuse balancée à demi-mot ou un drapeau blanc agité. Nouveau sourire pétillant à la chaleur de l'astre brûlant et l'éclat de rire qui se perdait entre les notes méditerranéennes flottant dans l'air. Elle tourna, tourna sur elle-même, entraînant Calliope dans sa ritournelle jusqu'au bar où elle commanda une bouteille. « Peut-être que je pourrais te faire apprécier cet endroit à défaut de tes cours de droit. T'en dis quoi ? »