You ? Here ? | Donovan

Journée d’entraînement terminée, Ariel en avait plein les bottes. Il aimait la natation, il était un véritable poisson dans l’eau. Mais aujourd’hui, il avait subi l’entraînement et du coup, il n’était pas vraiment content de lui. Il espérait que demain serait un autre jour. En attendant, il avait besoin de se vider la tête et de pouvoir oublier cette journée presque merdique. Il avait décidé de se faire un petit dîner avec un gars qu’il avait rencontré sur une application de rencontre. Rien de bien sérieux, il avait encore le myocarde en mille morceaux à cause de Sinéad. Alors très franchement, il préférait s’amuser plutôt que de retomber dans les filets de Cupidon. Malgré tout, aimant la galanterie et les belles choses, il avait pris la décision de se rendre chez un fleuriste, dans l’idée de ne pas arriver les mains vides chez cet homme. Il avait entendu parler d’une boutique située à Brooklyn. Il espérait trouver quelque chose de sympa et de pas trop cher. Musique dans les oreilles, il s’était donc rapidement mis en quête de trouver son bonheur.

Au bout d’une dizaine de minutes, l’athlète s’était retrouvé devant le magasin. Il y entra rapidement pour faire le tour du propriétaire, préférant observer avant de demander de l’aide à un professionnel. Il put rapidement se rendre compte qu’il y en avait pour tous les budgets. Il n’y laisserait donc pas sa chemise. Il prit donc rapidement son carnet dans son sac, un crayon. Il ne sortait jamais sans eux. Ariel était conscient que l’ensemble de la population ne connaissait pas le langage des signes. Il fallait donc trouver un moyen de communication. Il avait donc choisi d’écrire. Une fois ses outils de communication en mains, il chercha donc un fleuriste. C’est à cet instant que le visage d’un homme le frappa. Il l’avait déjà vu quelque part. Ne voulant pas perdre trop de temps, il s’était donc avancé vers lui. Cherchant tout de même s’il s’en rappellerait.

– Bonjour, j’aimerai faire un bouquet pas trop cher pour un rencard.

Le poisson n’était pas du genre timide. Et puis c’était bel et bien les raisons de sa venue. Il écoutait à demi-mot son interlocuteur lorsqu’il se souvint d’où il avait vu le fleuriste. Sans plus attendre, il lui écrivit ces mots qui pouvaient paraître lunaire.

– Dites-moi, vous n’auriez pas écrit un livre ?

A cet instant, le bouquet était passé au second plan. Il voulait être sûr de ne pas se tromper…

on s'est connu, on s'est reconnu.
on s'est perdu d'vue, on s'est r'perdu d'vue.

@Ariel Ortiz

Il aimait beaucoup cette boutique, il devait bien l'admettre. Les couleurs, l'atmosphère qui s'en dégageait et sa responsable était, avec le temps, devenue presqu'une amie. Ils s'entendaient à merveilles. Il faut dire qu'elle n'était pas suffisamment intrusive pour s'interroger quant aux raisons de la présence de Donovan à New York et qu'elle était juste ce qu'il fallait d'attentive pour aimer l'entendre lui parler de la France. C'était un subtil mélange agréable que Donovan trouvait particulièrement rafraichissant et qui lui donnait le sentiment d'être parfaitement à sa place. Il n'était ici que depuis quelques mois, à peine plus. C'était une aubaine d'avoir trouvé un poste ici, au coin de la rue dans laquelle il vivait.
Il aimait y venir, il trouvait dans les fleurs un parfum de bonheur qui lui soulageait souvent le coeur. Il oubliait ses soucis lorsqu'il poussait les portes de la boutique et lorsqu'il enfilait son tablier vert, il se sentait presque pousser des ailes.
Aussi, il est de bonne humeur Donovan.
Toujours. Aimable avec la clientèle et serviable. Le son de la cloche qui le ramène toujours à la réalité alors qu'il s'affaire à ranger les étalages ou préparer des bouquets. L'homme qui rentre lui est étranger et pourtant, Donovan remarque très vite le calepin et le stylo. Il ne pense pas à mal, le fleuriste, quand il s'approche de lui et qu'il lui demande s'il peut l'aider. Le regard que pose Ariel sur lui suffit à le faire sourire... et lorsque ce dernier lève l'encart sur lequel il a écrit quelques mots, Donovan comprend.

Bonjour, j’aimerai faire un bouquet pas trop cher pour un rencard.

Aïe, ça va pas être simple, qu'il pense tout bas en se souvenant que si son anglais n'est pas ce qu'il se fait de mieux, parler avec les mains sera d'autant plus compliqué pour lui. Alors aussitôt, il attrape un catalogue sur une étagère et se surprend à pointer du doigt plusieurs options sans piper mot lorsqu'il perçoit à nouveau du mouvement. S'attendant à ce que son client lui fasse part de son choix, il ne peut cacher sa surprise lorsqu'il lit :

Dites-moi, vous n’auriez pas écrit un livre ?

Il n'a écrit qu'un livre.
En France, bien loin d'ici. Un livre auto-publié qui n'avait rencontré aucun succès. Mais il avait mis une photo de lui en quatrième de couverture. Il fronce les sourcils, plante ses yeux dans ceux de son interlocuteur et articule du mieux qu'il peut pour se faire comprendre : Oui, j'ai écrit un livre. d'un ton assez hésitant. Comment le savez-vous ? interroge-t-il, prenant le soin de détacher chaque lettre et prêt à dégainer un carnet de notes s'il le faut.