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Oh baby baby, it's a wild world...

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Face au miroir de sa salle de consultation Elda ne peut s’empêcher de se tourner un peu et de poser une main sur son ventre qui n’a pourtant pas encore vraiment gonflé pour l’instant. Excitation des premiers mois de grossesse, désenchantement des nausées également et es premiers symptômes qui s’agglutinaient dans son quotidien. Les seins douloureux, les pertes de mémoire occasionnelles et quelques vertiges… il lui était de plus en plus délicat de cacher son état à ses proches, et en particulier à ses employés qui s’étaient inquiété plusieurs fois pour elle. Par superstition, cependant, elle avait tenu à garder le secret au moins jusqu’à cette première échographie, celle qui les rassurerait sur la santé de cet être qui se développait en elle.
Dernier coup d’œil au ventre inexistant, l’orthodontiste finit de ranger ses instruments avant de sortir de la salle, saluant sa collègue chirurgienne-dentiste avec qui elle partage le cabinet, ainsi que le secrétaire à l’accueil. Elle a prétexté un contrôle médical de routine, quand il ne s’agit en réalité en rien d’une routine ; quatrième fois qu’elle peut se réjouir de cet enfant à venir, de cette joie qu’elle partage avec celui qui sera bientôt son ex-mari. Voilà une situation qui risque d’être bien délicate à expliquer à son entourage qui ne comprend déjà pas pourquoi Aedan et elle se séparent, alors s’il faut en plus leur annoncer qu’ils maintiennent cette décision malgré un bébé à venir… Elle entend déjà ses sœurs s’inquiéter de la voir résister à cette vie de mère célibataire et comment feras-tu avec le cabinet et un bébé, tu n’as plus 30 ans Elda et tu es toute seule maintenant ! Pourtant, rien de tout ça ne lui fait peur, parce qu’elle le sait, elle n’est pas vraiment toute seule. Le divorce est en pleine procédure, ils vivent dans deux appartement séparés, mais cela n’entache en rien son amitié avec son futur ex-époux. Et, surtout, elle estime le connaître mieux que quiconque : quels que soient les liens entre eux, il aimerait cet enfant et s’en occupera mieux que n0’importe quel père au monde. Comme il l’a fait d’ailleurs pour les trois aînés…
Les trois aînés qui n’ont pourtant pas le même sang qui coule dans les veines. À cette pensée, Elda tord son nez tout en hélant un taxi au passage. Secret de famille bien gardé sous le terreau des mensonges ; le géniteur n’est pas celui que tout le monde croit et seuls Elda et Aedan sont au courant – car pourquoi devraient-ils en parler plus loin quand il est un père si formidable ? Le secret, pourtant, écorche parfois le bout du cœur quand elle pense à cet autre, celui qu’elle a aimé puis quitté, celui avec qui elle a couché toutes ces années quand rien ne fonctionnait avec son mari. Cet amant dans le placard de cette vie rocambolesque, pièce de théâtre de boulevard qui avait duré plusieurs années, le temps de mettre au moins trois enfants. Il lui avait posé la question, bien sûr. Et à chaque fois. Et elle avait toujours nié. Comme la fichue arracheuse de dents qu’elle était.

Le taxi s’immobilise devant son gynécologue. Course rapidement payée avant qu’elle ne sorte sur le trottoir entre le flot de new yorkais et de touristes qui peuplent en permanence le goudron. Le soleil est encore haut dans le ciel, il est à peine 14h, le timing est parfait et la journée est belle. Il faut espérer qu’il n’y ait pas trop de retard pour qu’Aedan et elle puissent ensuite rejoindre directement l’école des enfants, les attendre ensemble à la sortie et leur proposer, pourquoi pas, d’aller manger une glace. Un moment en famille, car le divorce n’excluait pas le petit cocon qui s’était forgé entre ces cinq âmes. Et puis ça pourrait être l’occasion de leur annoncer la bonne nouvelle, Harrison qui poserait son oreille contre le ventre maternelle dans l’espoir de sentir un premier coup de pied combien même ses parents lui expliqueraient qu’il était encore trop tôt, Oscar qui tirerait sur la manche de son père pour lui demander comment on faisait les bébés, Spencer qui hurlerait dans le parc en courant et en espérant que ça serait une petite sœur. Un moment de bonheur à croquer à pleine dents dans toute sa simplicité et les réminiscence de cet amour qui englobait le couple Sloane, même s’ils ne partageaient désormais plus la même adresse. Amour qui avait simplement pris une forme différente au fil des années, s’était transformé en cette amitié si particulière et qui comptait tellement.

– Aedan !

Elle le voit, là sur le trottoir et qui s’approche d’elle, à l’heure pour cette première échographie où ils vont entendre les battements de cet enfant à venir, ce mini eux qui aura les yeux de son père, le sourire de sa mère, tout l’inverse ou rien de tout cela. Qu’importe, ils l’aimeront, qu’importe, ils s’aimeront.

@aedan sloane
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Jour de repos, soleil taciturne qui s'était levé au matin, aspergeant de quelques faibles rayons le penthouse, pas suffisamment de lumière ni de chaleur pour réanimer les enfants, pas non plus suffisamment de chants d'oiseaux pour m'entraîner à leur poursuite, satyre moderne dont les sabots auraient foulé le plancher, sifflotant un air bien trop enjoué pour un matin. Les gamins se seraient réveillés en grognant, habillés en grognant, seraient partis enfin, en grognant, le ventre plein. Même des semaines après, je ne m'y faisais pas. Je m'étais habitué à toi, au bout de table, toi, ta tasse entre les mains, ces matins où elle était vide, quand on était dans le même brouillard, ces matins où ça nous faisait rire, commencer la journée du bon pied, comme un chemin dallé de belles ondes menant à la plus naïve des promenades. Tu étais déjà venue déjeuner avec nous, complétant cet arceau antique, temple aux mille trésors qui ne l'était vraiment que lorsque toute la fine équipe était présente. Les enfants et leurs sourires savaient hanter mes jours, donner à toutes les secondes un charme incertain, et pourtant, je ne me sentais jamais aussi bien que lorsque tu étais là, près de moi, à cette distance qu'il nous avait fallu apprivoiser au fil du temps pour l'adapter à nos confidences, nos sentiments. Romance incendiaire devenue tornade de cendres, mais on savait danser avec les brises, on savait tournoyer, et les braises n'avaient plus rien de sales, au contraire. On s'était figés dans ces flammes uniques, léchées d'un bleu qui était le nôtre, et il y avait en tout cela un charme certain.

Infiniment plus certain, en tout cas, que le réveil des enfants, puisque c'est moi qui grognait finalement, moi qui grognait contre les nuages, moi qui grognait contre la brique de jus d'orange presque vide, moi qui grognait à chaque pas, ours mal léché, jusqu'à ce que mes yeux se posent sur le calendrier. Je n'avais évidemment pas oublié la date. Mais lire les mots apportait une saveur douce à toute la journée. Il y aurait le palpitant de notre enfant à naître, ce fils d'amour, cette fille de tous les bonheurs. On n'en avait jamais reparlé ensemble, pas comme pour les premières grossesses, où les débats avaient été de tous ressorts, boîtes à vis dont l'on découvrait chaque fois une nouvelle torsade ; il aurait été logique que je souhaite une petite fille, au moins pour une répartition parfaite, mais une partie de mon instinct me disait qu'il s'agissait d'un petit gars. Impossible de savoir, et ce n'était pas dans les questions prioritaires pour le moment ; le bébé aurait pu se métamorphoser en papillon, en grenouille ou en nuage que j'aurais trouvé le moyen de l'aimer de la même façon.

Petit-déjeuner débarrassé par le plus grand, Oscar qui aide sa soeur à s'habiller pendant que je termine ma douche, le temps qui nous a dépassé, sablier traître, influencé par ce foutu soleil doucereux qui avait décidé de ne pas brûler mon réveil pour qu'il se rappelle à sonner. Pas d'après rasage, pas de parfum, rien de tout ça d'habitude ; et aujourd'hui, face au miroir, le visage aussi lisse qu'une coquille d'oeuf, je me laisse aller à quelques effluves, les premiers pschit comme toujours trop intenses, déformation professionnelle, le nez qui vrille pendant quelques millisecondes alors que je fuis à grands pas la salle de bains. "Allez, chicos, on se bouge un peu sinon on va être en retard !" Enfin, eux surtout. J'ai encore cinq heures et demie devant moi quand ils claquent la portière : alors, une fois n'est pas coutume, je rentre, et je m'endors. Au diable le parfum dans les draps, ils n'en ont plus et je n'ose pas te demander la marque de la lessive, de peur de réveiller l'un des rares tabous, l'enceinte du couple en cette couche que nous avons fui à tour de rôle. Sur le chemin, pas de bouquets de roses, pas de chocolats, j'ai connu tes envies de grossesse, j'ai réussi à faire de mon mieux pour les assouvir, et pourtant la distance mise entre nos quatre oreilles, le soir, parvient à cacher sous d'épaisses ombres certaines pensées. J'aimerais savoir tout de toi, tout le temps. M'assurer que tu vas bien. Que tes lèvres chantent, que ton coeur s'enchante. Mais ça ne serait pas correct. Sur la première table du hall, un bouquin de fiction à la couverture chatoyante recouverte du papier cadeau restant de Noël, les paupières lourdes au bout de quelques pas, je m'endors, les semelles qui viennent heurter les draps d'une façon qui aurait fait hurler plus d'un adulte responsable.

Adulte responsable qui s'éveille sous ce même fichu soleil clairsemé, voit l'heure qui est passée, et je me rassure en me disant que je n'ai pas faim, que la glace avec les enfants, après le rendez-vous, saura caler mon estomac pendant quelques heures. Gaufrette et vanille, un bout de chocolat, le paradis des moins de vingt ans, et ma seule denrée possible avant le dîner. Peut-être faudrait-il que je t'invite à dîner dans un de ces nouveaux restaurants, ceux qui vont joncher nos histoires plus qu'entrecroisées à l'avenir. Un endroit neutre où tu pourras un jour où l'autre présenter ton nouveau fiancé, celui qui me fera grincer des dents, celui qui te rendra sans doute heureuse, d'une autre façon, mais jamais autant que moi j'aurais pu le faire. Trop différent. Trop amant de ces hommes qui, une fois le verrou déclenché, avaient réussi à m'expliquer pourquoi je n'avais jamais aimé à leur juste valeur toutes ces formes de ton corps, infiniment abstraites et pourtant si entêtantes dans ma tête. T'avais-je déjà confié combien je t'aime avant de me rendre compte qu'il ne le fallait plus ?

Pensée qui traverse ma tête en même temps que le soleil perfore l'habitacle, m'éblouit un instant, juste assez pour m'indiquer la place de parking salvatrice, celle qui me permettra de ne pas être trop en retard. Le frein à main enclenché, rapides bâillements pour ne plus les éprouver par la suite, et puis je dévale le bitume, à la recherche de ces portes familières, déjà traversées pour ta grossesse du projet Spencer, et tu apparais avant elle, le visage tendu pour tenter de me trouver, et comme à chaque fois que tu t'incarnes, tout se coupe, plus un bruit, plus une lumière, plus même une odeur, parmi la foule de celles qui envahissent d'habitude mes synapses, rien que toi, ta silhouette divine, et le reste du monde en rideau de velours sur ta scène. Alors je me hâte, et tant pis si tu comprends mon retard. J'ai trop besoin d'être près de toi. Tu m'appelles par mon prénom quand j'ouvre mes bras, te serre contre mon torse quelques secondes, les coeurs en diagonale qui chantonnent la même chanson. "Désolé du tout petit retard. J'ai pas pu résister à Morphée en revenant à la maison ce matin." Peut-être à cause du taf, peut-être à cause du divorce, peut-être à cause de tous ces jeux aux formes de bois colorées qui m'échappent sans que je puisse les remettre dans les bonnes cases. Jeu pour enfant, pourtant ; mais j'avais échoué à bien des affres de la jeunesse, comme à ces amours masculines qui, si elles n'avaient pas été refoulées, auraient pu t'épargner notre séparation, m'infliger une vie entière sans toi. "Comment tu te sens, Rose ?" Le surnom est sorti comme ça, sans prévenir, vestige de ce passé d'embrassades, typhons fleuris, le petit prince et sa rose, éternelle romance sans qu'elle ne puisse se consumer.

@elda sloane
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L’odeur familière qui inonde les sinus, un peu trop fort dans le brouhaha de la ville. Il est le Nez, ce talent si particulier qu’il ressemble presque à un pouvoir de super-héros, mais en ce moment avec la grossesse, c’est elle qui a l’impression de subir les odeurs avec trop d’impactes, trop de puissance. Heureusement, la sienne est rassurante, familière, apaisante. Malgré les derniers événements et la décision de la séparation, les cartons encore accumulés dans sa chambre à coucher – il y en a toujours un, comme une malédiction qui reste, qu’on ne parvient pas à défaire, par peur que ce soit trop définitif, par peur des souvenirs qu’on pourrait y retrouver –, il est toujours aussi important dans sa vie. Ça ne rend étrangement pas les choses plus évidentes pour autant. S’il est difficile de se séparer quand on n’aime plus, qu’en est-il quand on aime encore ?
Jamais, pourtant, Elda n’avait imaginé remettre en question cette décision qu’ils avaient prise conjointement. Il était beau, pourtant, le jardin dans lequel ils avaient grandi ensemble, mais ces frêles pétales avaient besoin de s’épanouir ailleurs, et le grillage qui l’entourait compliquait les choses. Peut-être que s’il n’y avait pas eu cette séparation avec celui qui avait été son amant pendant tant d’années, les choses ne se seraient pas passées ainsi ; pas tout de suite, du moins. Cette autre rupture avait cependant mis en lumière les failles de leur relation, au-delà de ces moments de tristesse qui les avaient bousculés vers un rapprochement physique et surprenant. La mère de famille avait besoin de plus que ce qu’il pouvait lui donner, et si elle avait longtemps cru trouver un équilibre en allant chercher ailleurs ce qui ne fonctionnait pas dans son mariage, l’évidence avait été flagellante au point final de l’histoire avec son amant : elle ne pouvait se contenter de diviser ainsi pour mieux régner. Il lui aurait fallu plus à offrir à celui qu’elle avait choisi de quitter en premier. Des choses qu’elle était incapable de donner tant qu’un anneau brillait à son doigt. Pour le meilleur et pour le pire, certes, mais pas dans le même lit.

Elle se laisse envelopper dans l’étreinte qui lui est grande ouverte, oreille qui se pose sur le torse dont elle cherche le pouls à l’ouïe, comme pour en décortiquer tous les secrets qui y résident encore. Parfois elle se demande s’ils n’auraient pas dû essayer plus, chercher à communiquer plutôt qu’elle s’évade ailleurs, voir les choses autrement. Mais il était trop tard désormais, quelque chose de fin et fragile s’était délité et si l’amour était toujours là, plus rien ne serait plus jamais pareil. Il n’y aurait plus de matin où elle tomberait sur lui le visage moitié enfoui sous un livre dans les pages duquel il se serait endormi. Il n’y aurait plus d’escapade juste tous les deux à découvrir des jardins botaniques aux mille parfums en ayant laissé les enfants chez l’un ou l’autre de leurs oncles et tantes. Il n’y aurait plus non plus d’anniversaire de mariage dans ce restaurant où ils avaient fêté leur un an et qui ne payait pas de mine de l’extérieur mais qui faisait pourtant les meilleurs pierogis de New York.

– Tu ne travaillais pas aujourd’hui ?

Pas de bouquet floral pour son odorat, simplement gérer les enfants pour qu’il soit à l’heure à l’école – et c’était un exercice particulièrement compliqué. Morphée avait également tendance à teinter de ses sables les réveils de leurs enfants et plus ils grandissaient, pire c’était. Elda ne se réjouissait pas de l’adolescence qui finirait bien un jour par pointer le bout de son nez- D’un autre côté, c’était aussi une période propice à la responsabilisation.

– Honnêtement je suis très fatiguée, je vomis tous les matins et je peine déjà à rentrer dans la plupart de mes soutiens-gorges.

Peut-être que la grossesse était une période de la vie épanouissante pour certaines personnes ; pour Elda ce n’était pas réellement le cas. Bien sûr, elle était infiniment heureuse de savoir qu’un bout de vie poussait en elle, et particulièrement impatiente à l’idée de rencontrer ce quatrième enfant. Mais l’épanouissement nauséeux était peu agréable.
Et puis il y avait toujours les doutes et les angoisses qui accompagnaient son quotidien. Aujourd’hui était d’ailleurs la première confrontation à ces peurs. Depuis la grossesse de Spencer, cinq années étaient passées et elle était désormais plus proche de quarante ans que de trente avec tous les risques supplémentaires encourus le développement du fœtus. Mais pour en dissiper quelques uns, encore fallait-il pousser les portes de l’immeuble et monter jusque chez son gynécologue.
Main qui se blottit dans la paume avec qui, il n’y a pas si longtemps, elle partageait encore un anneau, elle l’entraîne à sa suite en direction de l’ascenseur qui s’ouvre au moment où ils mettent un pied dans le hall, comme un ballet parfaitement orchestré. Stress qui monte avec les étages, ils arrivent rapidement dans le cabinet où on lui tend quelques documents à remplir – heureusement que le divorce n’a pas encore été prononcé, ça facilite toutes ces histoires d’assurance maladie.

– Tu m’attends dans la salle d’attente ? demande-t-elle en rendant les papiers au secrétaire médical. J’ai une affaire pressante à gérer.

Rapide tour aux WC pour soulager sa vessie qui commence déjà à se manifester un peu trop régulièrement, elle rejoint ensuite les chaises en bois bien alignées au quatre coins de la salle d’attente, saluant d’un sourire une jeune adolescente accompagnée de sa mère, avant de rejoindre son futur ex mari.
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Comme six roses enlacées d'une même ficelle colorée, la nuque exhibe ses senteurs florales, alcoolisées par juste ce qu'il faut d'une odeur de rhum pour embraser ton nez. Tu as toujours eu un talent particulier pour reconnaître les effluves, peut-être parce que je m'étais habitué à te faire des quizzes improvisés dès qu'un nouveau parfum me venait en tête, ou dès qu'une nouvelle bouteille venait habiller mon col. Logique, donc, que tu aies pu discerner en quelques minutes seulement le parfum qui avait hydraté mon épiderme, le colorant de teintes qui devaient t'être familières, le modèle choisi ce matin pour justement ne pas trop te perturber, ton odorat déjà bien titillé par la grossesse comme il l'avait été lors des précédentes. Était-ce plus intense, cette fois ? Est-ce que l'odeur des rues de la ville t'indisposait, mélange de goudron, de brûlure, d'herbe et d'un peu de ces épices qui hantaient les camions dans les coins de blocks ? C'était une de ces nombreuses questions qui se posaient bien évidemment quand je n'étais plus ton partenaire de vie, que je ne voyais plus au long des jours si ton sourire s'esquissait ou si ton dos s'arquait, ne pouvant plus intervenir ; mais il avait fallu m'y résoudre, et ces quelques moments que le temps me volerait au cours des mois à venir ne vaudraient, sur le long terme, probablement pas le sentiment de justice. La balance était équilibrée ; je ne pouvais pas te condamner à vivre aux côtés d'un mythe, d'une suspicion d'infidélité, car depuis que la vérité crue s'était parée de ses vrais mots, de cet autre qui avait été le tien avant de glisser contre ma peau, je savais qu'il te faudrait souffrir quand tu découvrirais ce qu'il se passait dans ces coulisses que je te déguisais. Tu supporterais probablement de me voir en aimer un autre, peut-être même serais-tu heureuse de me voir épanoui, et c'était là toute l'unicité de notre union et de ce lien qui perdurerait encore sur plusieurs millénaires si le temps venait à se figer ; mais tu ne pourrais pas tolérer de voir mon sourire s'accorder à celui qui avait effleuré le tien, l'avait esquissé du bout de ses lèvres sur tes joues si douces. "Les seins et la gorge, c'est ce qui t'a toujours le plus faite souffrir. Je passerais à ton marché, voir s'ils ont ta fameuse pâtisserie." La première question éludée, car tu avais deviné que je ne travaillais pas, et déjà les mollets s'activent, les mots flirtent avec le vent. La fameuse pâtisserie, celle-là même qui durant tes deux dernières grossesses, avaient réussi à dissiper toutes les nausées. Une sorte de solution miracle, un peu coûteuse, mais à force d'empiler les cartons sur notre plan de travail, on avait tissé un lien avec la vendeuse, qui s'était trouvée être aussi la créatrice de ton apaisement, et de là, on avait eu le droit à des réductions spéciales. Peut-être que cela suffirait, peut-être pas : mais on trouvait toujours des solutions, et s'il fallait t'acheter de nouveaux sous-vêtements aussi, j'enfilais le manteau du mari pas encore divorcé avec plaisir. Nos mains qui s'accrochent, l'ascenseur qui s'ouvre alors que mes lippes se détachent de ton front, tendresse infinie, rappelant encore et toujours combien nos deux âmes étaient liées, mêmes pièces d'un pendentif brisé qui scintillait quand nous étions à côté l'un de l'autre.

Les documents vont dans tes mains quand nous arrivons dans la salle d'attente, et déjà tu disparais. Tu tremblais un peu, lors de notre apogée mécanique, et je n'ai rien dit car je ne voulais pas que tu puisses m'en vouloir ; stupide, quand je savais parfaitement que tu aurais du mal à m'en vouloir de quoi que ce soit, ayant même toléré et supporté notre séparation sans qu'il y ait de vagues. Les autres divorces étaient semblables à des tsunamis, et le nôtre avait des teintes d'une belle toile peinte à l'huile. Tout était joli, à tes côtés. C'était sans doute pour ça. Le regard distrait qui se perd sur l'écran de mon téléphone quelques instants, pas de nouvelle de mes soeurs, pas de nouvelle non plus de mon frère, et c'était signe qu'il fallait que je leur écrive. Trois messages soigneusement rédigés, juste de quoi les informer que tout se passait bien, sans évoquer forcément la grossesse ; ils n'étaient pas encore tous au courant, comme si c'était un secret bien protégé. Le divorce était déjà une annonce qui les avait fait pâlir, eux qui nous avaient vus nous aimer si fort au cours des années, eux qui n'auraient jamais deviné, si les mots parvenaient à franchir mes lippes un jour, que je pouvais en aimer un autre, au masculin. Mais déjà tu chasses sa silhouette de mes embruns, revenant t'asseoir à mes côtés, ma main sur ton genou, la tienne sur le mien. "Ça va bien se passer." Non pas que tu en doutes forcément, mais au moins la voix qui vise à t'apaiser, comme un bandage lourd qui se poserait sur chaque maux. "Harry t'a parlé de sa sortie scolaire dans deux semaines ? Je crois que ça tombe chez toi. Ils vont à la cité des sciences... Ça a pas l'air de l'emballer, et quand j'essaie de le convaincre, il m'envoie bouler." Haussement d'épaules, légère moue sur les lèvres. Harrison avait toujours été plus propice à tes phrases, là où Oscar exultait de chacune des miennes. Les enfants étaient un mystère que j'avais eu plaisir à tenter d'élucider à tes côtés ; mieux encore, malgré la fin de notre mariage, on continuerait à former cette belle équipe pour les éduquer au mieux, et s'ils avaient toujours été bien élevés, rien ne garantissait qu'ils ne disjoncteraient pas une fois l'adolescence venue. S'il s'agissait de notre aîné, tu étais la plus à même de le calmer ; à croire que le premier regard qu'il avait lancé, fixé sur tes beaux iris, avait été déterminant de toute sa volonté à te consacrer son âme toute entière s'il l'avait pu, bébé prêt à se damner pour le plus beau clin d'oeil de sa mère folle d'amour.

@Elda Sloane
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Il la connaît par cœur. Dans les moindres détails, les plus petites touches de couleurs qui composent sa corolle. Aedan s’est infiltré sous les pétales et a su lire en elle, a appris a lissé vaillamment chaque froissement, la pousser toujours plus haut. Parfois, Elda se demande comment ça serait de vivre cette grossesse à ses côtés. En tant que couple, pas seulement en tant que parents ou amis. Les gestes tendres qu’il avait lors des trois précédentes, les petites attentions qui parsemaient ses journées, ces moments où il venait la chercher au cabinet pour l’emmener manger dans leur restaurant préféré. Pétales de roses dispersé sur leur histoire, carmin de la fleur qui coule sur cette relation. Désormais l’alliance n’est plus à son doigt, mais pend à son cou comme le souvenir d’une vie passée. Trépassée.
Elle sait cependant qu’ils ont fait le bon choix – s’en persuade. Non pas qu’elle n’a pas aimé cette vie, toutes ces années à ses côtés. Mais quelque chose s’est brisé dans la rupture avec son amant ; quelque chose d’infaillible et qui pourtant courait là depuis longtemps. Elle a besoin de plus, de quelque chose que son bientôt ex époux ne peut pas lui donner. De pouvoir vivre au grand jour les histoires d’amour qui s’épanouissent sur ses sourires, de ne plus avoir à cacher un autre qu’elle a également aimé durant toutes ces années. Ça lui paraît presque un peu égoïste quand elle y songe, parfois, toute seule dans son lit.

– Tu es parfait. Tu sais, je crois que je n’y ai plus remis les pieds depuis l’accouchement de Spencer.

Elle passe doucement la main sur son ventre à peine arrondi en se rappelant ce moment où la poche des eaux s’était rompue, le trajet jusqu’à la clinique et les longues heures à attendre que les contractions soient assez rapprochées, que le col soit assez dilaté. Moins de panique que pour le tout premier, il faut croire qu’avec le temps on acquérait une certaine forme de sagesse. Ça n’avait en rien empêché cet atroce moment de suspens, celui où leur fille était sortie, cette attente pourtant infime de son premier cri, hurlement qui déchirerait ses poumons et apaiserait le cœur de ses parents. La perspective de savoir qu’elle allait bien, qu’elle était vivante et parvenait à respirer.
Toujours cette même crainte qui traînait dans ses pensées. Et la perspective de la première échographie ne la rassurait pas vraiment. Que se passerait-il si le cœur ne battait pas ? Si le gynécologue discernait une malformation ? Heureusement qu’il est là avec elle. Dans ces instants si important pour la vie de ce futur enfant, ils redeviennent ce binôme si jeune et amoureux, les regards peine adulte qui se lisaient de la poésie dans le jardin de ses parents, les fleurs comme des ombrelles qui s’amusaient à déchiqueter la lumière du soleil pour créer des guirlandes d’ombres miniature.

Arrivés au cabinet, elle l’abandonne quelques instants pour passer au toilettes, puis retrouve son refuge à ses côtés dans la salle d’attente. À les voir ainsi, les doigts qui s’égarent sur un genou, les regards qui épousent un sourire, personne n’aurait douter qu’ils étaient en instance de divorce, deux poupées de chiffon qui trompaient si bien leur monde. Personne n’avait jamais deviné d’ailleurs, tous les écueils dans leur relation. Les embrumes de la nuit qui s’éteignaient entre leur corps, les soupirs avortés à leurs lèvres, et surtout la présence d’un autre qui s’agitait en soubresauts dans les fonds marins, cachés par toutes les attentions du couple Sloane, par ce véritable amour, discret mais si fort, qu’ils manifestaient toujours en présence de l’autre. Est-ce qu’un jour ça s’éteindrait ? Pouvait-on arrêter d’aimer d on avait aimé si fort, toute sa vie d’adulte ? Encore une fois il a bien senti son trouble, ses angoisses qui tapissent son estomac. Mots réconfortants qui se frayent un chemin jusqu’aux pensées les plus sombres. “Hmm…”. Il faut s’y raccrocher, pourtant. Ça ira. Il le disait également pour les trois précédents. Et ça avait toujours été. Ça allait encore aujourd’hui, alors qu’ils les regardaient grandir et devenir ces personnes formidables – parfois un peu ronchonnes, il est vrai.

– Je vais en discuter avec lui. Mais je crois qu’il n’est pas content parce que Liam y va cette semaine et qu’il aurait aimé découvrir ça avec lui.

Liam et Harry s’étaient rencontrés au Pre-Kindergarten et ne s’étaient plus jamais quittés depuis. Ils étaient devenu les meilleurs amis du monde, si bien que les Sloane avaient rapidement sympathisé avec les parents de ce meilleur ami, faisant régulièrement des activités ensemble. Puis, au début de l’année, ça avait été le drame : ils n’étaient plus dans la même classe. Et pour Harry qui avait tant de peine à créer de nouvelles amitiés – là où son frère et sa sœur étaient très extravertis socialement – ça avait été un choc. Si bien qu’il boudait désormais à chaque nouvelle sortie de classe qui n’avait pas lieu avec celle de Liam.

– M. et Mme Sloane ?

Ils n’ont pas le temps de poursuivre la conversation que le Dr apparaît dans l’embrasure de la porte, un dossier déjà entre ses mains. La main d’Elda vient aussitôt attraper celle d’Aedan, serrant un peu trop fort les doigts. Il faut croire que c’est leur tour.
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Liam et Harry, en train de jouer dans un bac à sable en forme de coquillage vert, Liam et Harry pendant un match de foot, les maillots verdis par l'herbe humide de Central Park, Liam et Harry en train de lire des bouquins d'épouvante dans un coin de la chambre de notre fils. Et puis l'accouchement de Spencer, les larmes, les rires, les mains serrées, la poigne, les énergies, les cris, la joie, les pleurs de nouveau. La façon dont elle avait embelli une vie qu'on ne pensait pas pouvoir imaginer plus belle. C'était marrant, cette façon que tu avais d'évoquer les albums de famille du bout des lèvres, rappelant à mon souvenir la façon dont nos destins s'étaient si bien mêlés. Trois beaux enfants, sensibles, intelligents, drôles, et au-dessus il y avait nous, le couple parfait. Les Sloane ne digéreraient jamais le divorce, ils étaient trop persuadés que tout allait bien entre nous, que l'univers entier se basait sur l'équilibre au sein de notre couple. Il faudrait que je prenne mon courage à deux mains, pour leur en parler. La peur panique de décevoir, comme toujours, que ce soit au-dessus d'une éprouvette aux effluves trop fortes ou là, à côté de toi, à me demander si je faisais bien les choses. Tu étais souriante, même si inquiète, et c'était déjà une belle preuve, un bel encouragement.

"T'as toujours été plus forte que moi pour le convaincre." Parce que tu avais sans doute ce que je n'avais pas : un accès direct à ses pensées les plus intimes. Tu avais deviné qu'il y avait un problème à la rentrée avant même que je ne puisse remarquer qu'Harry faisait plus la tête que d'habitude. Et avant même que je ne puisse essayer d'enquêter, tu avais sorti la clef de voûte, la vérité à toutes ces questions qui nous tournaient en tête. Il pensait avoir perdu son meilleur ami ; et là, j'avais pris le relais, lui indiquant que ce n'était pas l'école qui les avait rendu potes, lui parlant de ces amis d'enfance que j'avais encore, comme son oncle Charlie, qui venait nous rendre visite une fois par an, et ça lui avait donné le sourire, d'imaginer qu'il aurait toujours Liam dans sa vie dans vingt ans. A la vie à la mort, ils s'étaient donnés le petit doigt pour le jurer pendant une soirée pyjama, à la vie à la mort, on se l'était promis devant l'autel. "D'ailleurs..." Pas le temps de finir la phrase, d'évoquer Oscar, non, le médecin est là, nous appelle, et je ne trouve même pas ça bizarre qu'on t'appelle madame Sloane ; tu l'es encore pendant quelques temps, pas vrai ? Et ce n'était même pas ton nom de jeune fille revenu dans le passage qui pourrait perturber nos serments. Non, on était bien plus forts qu'un simple nom ; et s'il m'avait fait tomber amoureux de toi, c'est que tu resterais toujours la même, Sloane ou non. "Allez, on y va." C'est un murmure, plus à moi qu'à toi, et nos mains s'emmêlent quand on se relève, tu as les doigts froids, et je songe à te proposer les gants qui sont dans ma poche. Tu refuseras, et c'est bien naturel, ce n'est pas le moment ; mais au moins ça te fera rire, ça rendra tes paumes moins moites, tes phalanges moins turbulentes. J'ai envie de te répéter que tout va bien se passer, mais ça ne vient pas ; tu le sais déjà, et puis on communique par pensées depuis pas mal de temps maintenant.

Alors je reste muet, sourire aux lèvres, t'accompagne dans le bureau du médecin, t'aide à enlever ton manteau avant de m'asseoir à côté de toi, nos mains accrochées en une salade de doigts sur mon genou, qui fait tout pour ne pas s'agiter au rythme de mon stress. Je te décoche un regard de côté, l'air de te demander si tu es prête, parce que c'est une belle étape que chaque rencontre avec notre quatrième enfant, et si aucune syllabe ne passe mes lèvres, ne te pose la question, je pourrais jurer que tu hoches la tête. Tu me donnes du courage, comme toujours, et pour enlever un peu de tension je souris plus fort, repense à cette conversation avec un client régulier, celui au costume bleu nuit, au parfum impeccable. "Comment vous allez, docteur ? J'ai appris que votre fille avait suivi votre exemple, qu'elle avait eu son diplôme en même temps que le fils Sum-Park, félicitations !"

@Elda Sloane ❤
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Les années filaient, les enfants grandissaient et Elda n’était pas certaine que, d’ici quelques temps, elle continuerait à comprendre aussi bien ses enfants. Elle avait peur aussi, qu’une fissure se soit immiscée quelque part dans la famille, dans cette séparation dont personne ne s’était jamais douté, malgré qu’Aden et elle aient tout fait pour rendre les choses aussi douces que possible, se voyant encore régulièrement, n’hésitant pas à appeler l’autre part à la rescousse au moindre problème ou simplement s’il manquait aux enfants. Les choses, pourtant, n’étaient plus les mêmes et si le divorce était une pratique bien plus courante qu’un siècle auparavant – la moitié de leurs camarades avaient des parents séparés –, ça n’en laissait pas moins des entailles, même quand il n’y avait pas de cris – et peut-être, même, que le fait qu’il n’y ait jamais eu de cris, de violence, de larmes, rendait le tout encore plus compliqué à saisir, comme s’il était plus facile d’accepter la fin d’une guerre par le replis des deux partis, plutôt qu’une frontière nouvelle dressée entre deux alliés. La mère de famille aurait souhaité protéger ses enfants au mieux, leur épargner cette décision d’adulte qu’ils subissaient sans avoir rien choisi. Cependant, il fallait reconnaître que la situation durait depuis trop longtemps, c’était trop compliqué et elle avait besoin d’avancer, de rencontrer un jour quelqu’un de nouveau pour qui elle serait entièrement disponible, pas seulement à temps partiels et extra conjugal.

– C’est un travail d’équipe.

Car au delà de tout mariage écourté, c’était ce qu’ils demeuraient ensemble : une équipe. Prêts à s’épauler avec les enfants, toujours à soutenir l’autre et à ne jamais tenter de corrompre les enfants d’une manière ou d’une autre pour qu’ils préfèrent papa ou décident de passer plus de temps avec maman. Elle savait qu’elle pourrait toujours se tourner vers son ancien époux et qu’il n’y aura jamais meilleur père que lui. L’équipe Sloane, un nom qu’il partageait et qu’elle comptait garder, même après le divorce. Après tout, c’était celui de ses enfants et de sa famille et, même si l’annulaire était désormais nu et qu’ils finiraient un jour ou l’autre par signer officiellement les papiers de leur divorce, Aedan n’en restait pas moins sa famille.
Les deux se lèvent, les mains liées comme un jeune couple qui viendrait pour une première grossesse, effrayés par tout ce que représentait l’arrivée dans leur vie d’un tout nouvel être. On avait beau l’avoir vécu plusieurs fois, on ne s’y habituait pourtant jamais complètement. Heureusement ils traversent ça ensemble, et la présence à ses côtés donne à Elda la force d’affronter tout ça, de sourire au docteur, d’être prête à entamer ce processus à la fois court et long qu’est l’accompagnement médical au cours d’une grossesse.


Discussion d’usage, le gynécologue se réjouit avec Aedan de la réussite de sa fille, même si tout est encore loin d’être joué, la formation pour devenir médecin est longue et il n’est pas certain qu’elle suive sa voie en gynécologie – il l’espère néanmoins, plaisante même sur la possibilité que, dans quelques années, ce soit elle qui accompagne l’un des enfants Sloane dans une grossesse. Enfin, ils sont là pour cette belle nouvelle, il se doute que tout le monde est impatient de la première échographie, pour vérifier que tout va bien et que le cœur du bébé bat correctement, que sa tête est bien formée. Il demande le dernier jour des règles – 20 mars –, sourit malicieusement au calcul de la date du terme, a veille de Noël. Peut-être un cadeau supplémentaire à glisser sous le sapin, même si on le sait bien, les bébés n’en font souvent qu’à leur tête, se pointant quand ils le désirent. Le médecin fait le tour de quelques questions, lui indique qu’il faudra passer auprès de son assistant après la consultation pour une prise de sang, d’urine et de poids afin de vérifier l’évolution de son état. La routine, elle connaît après tout.
Et puis c’est le moment tant attendu, celui qui bouscule les cœurs un peu plus fort, il désigne la machine qui permet de faire les échographies, Elda se rappelle encore les précédents suivis, les images de ses trois enfants, et surtout celle, si particulière, du tout début, quand on prend conscience, soudain, que tout cela est bien réel, que ce n’est pas que dans sa tête. Elle retire ses chaussures, déboutonne son jeans pour offrir un meilleur accès à sa peau et soulève son T-shirt, dévoilant un ventre déjà arrondi, un peu plus qu’avec Spencer et rien de comparable avec Harry. Comme si son corps, déjà se souvenait au fur et à mesure des grossesses, qu’il faut s’arrondir pour laisser la place à l’embryon de pousser correctement.
Le gel la fait frissonner alors qu’elle cherche de nouveau la main d’Aedan, la machine se pose et une première image apparaît, myriade de pixels qui offre la vue sur cet être si minuscule qui ne se rend certainement pas compte de toute l’attention qu’il reçoit soudain. Ça lui coupe un peu le souffle, quelques larmes qui montent, l’émotion ou les hormones, les deux peut-être.
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Discussion qui s'achève, les mots qui prennent fin quand tu te relèves, alors qu'il t'indique la machine, on le connaît bien, à force, ce Bifrost entre les mondes. Il y a eu les premiers battements d'Harry, ceux d'Oscar, puis ceux de notre bébé à tous les deux, Spencer, la dernière de la famille ; enfin, c'est ce qu'elle était jusqu'à présent. Maintenant, tout va changer : il y a ce quatrième enfant, ce bébé qui résonne étrangement avec un morceau de mon coeur, sans que je puisse savoir pourquoi. Aucune envie de le savoir, et à la fois aucune envie d'écarter la possibilité sordide qui se profile dans un coin de mon cerveau. Est-ce que j'aimerais plus ce bébé que les autres parce qu'il est de moi ? Est-ce que les gènes prendront le pas sur tous les souvenirs, sur les dizaines d'album qui s'entassent dans un coin de la bibliothèque, pour l'instant ? Non, c'est impossible. Ce ne serait pas propice, ce ne serait pas moi. Nos trois enfants sont les vrais amours de ma vie ; je les aime comme on aime regard un ciel de mille soleils, en voyant quelques-uns qui se distinguent plus que les autres ; ils sont plus dorés, plus brûlants, plus proches d'une déflagration d'Hélios. Une voûte de cent astres, et pourtant trois étoiles brilleraient toujours plus que les autres ; c'était ça, finalement, être parent. Un rôle que je n'aurais jamais pensé embrasser à ce point : et là encore, j'étais forcé à me demander si cela venait juste du premier cri, de la première larme, des sourires mémorisés, ou bien si ça t'était lié à toi, le vrai amour de ma vie. Qu'il était difficile de se convaincre que notre histoire avait pris fin ! Alors, on avait choisi de trouver quelque chose d'autre, une façon détournée de vivre autrement ; à tous ceux qui nous demandaient ce que nous vivions, nous répondions juste que nous avions pris d'autres chemins, que nous nous étions détournés des sentiers bien tracés, bien parallèles de la société. Je t'aime, tu m'aimes, on s'aimera probablement pour toujours, la seule différence est dans la nature même de notre amour. Il est plus précieux, plus doux que jamais. Et cette fragilité revêt une autre robe ; j'écarte les tissus de mes pensées en te voyant relever ton T-shirt, en voyant ton ventre arrondi. C'est étrange, je n'avais pas encore réalisé : pour les trois premiers, j'avais été en capacité de voir ton ventre à tout moment de la journée, j'avais pu le regarder, rêveur, j'avais pu le caresser aussi, dès que l'envie se présentait de sentir sous mes paumes les premiers pas. Aujourd'hui, tout était différent : nous ne passions pas nos journées ensemble, pas plus que nos nuits. On demeurait proches, mais il aurait été étrange que je te demande de m'accorder toutes tes heures, juste pour l'égoïsme de te voir te métamorphoser sous de nouvelles formes, juste pour l'égocentrisme de savoir qu'en ton coeur vivait un peu de nous deux, et qu'il fallait que je puisse résonner avec ces échos-là à tout moment. Non. Je t'avais fait bien assez de mal en te demandant de nous résoudre à la séparation.Tes doigts se glissent contre les miens, me sortent de mes idées. Le gel est froid, tu as toujours frissonné, et je sais qu'en sortant de cet immeuble tu me diras que "tu aurais préféré qu'ils évitent le congélateur", et derrière ça, comme pour les trois premières fois, je verrais non pas le froid sur ton ventre, non pas les frissons, mais bien ton inquiétude pour notre bébé. Ils passaient avant tout, toujours, en toute situation, pas vrai ? J'avais longtemps cru que nos enfants étaient les muses, et nous les attablés, occupés à se sustenter de chaque plaisanterie, de chaque question. Et puis, avec le temps, et notamment avec le début d'adolescence d'Harrison, j'avais compris. C'était nous, les muses. Eux, ils s'inspiraient, tentaient d'être proches de ce que nous avions fait, et paradoxalement, d'être les plus différents possibles. Ils apprenaient de nos erreurs, ne les reproduisaient que pour nous tester, ou que pour se briser de la même façon que nos reflets. Et nous, nous ne vivions que pour eux ; muses poétesses, muses inspiratrices, nous ne respirions que lorsque nous étions sûrs qu'ils respiraient aussi. Nous ne laissions nos palpitants battre, nos myocardes s'agiter, que si les leurs se mouvaient également. Et justement, déjà, les premières percussions vinrent mouiller nos yeux, nos doigts serrés un peu plus fort. Premiers battements de coeur tardifs, j'avais eu peur pendant quelques secondes, et toute la tension était retombée, en même temps que j'avais posé ce baiser pareil à tous les autres, sur ton front. Une scène répétée trois fois déjà ; et pourtant, il y avait toujours un bis, il y avait toujours le même trac. "Il... Elle... Purée, à chaque fois. Tellement beau. C'est ton nez, on dirait." Légers éclats de rire, et puis nos mains toujours liées, nos regards dirigés vers le même endroit. L'écran qui s'anime, les couleurs qui manquent, mais c'est pas grave, j'imagine déjà le rosé de tes lèvres sur sa bouche, et le bleu de tes yeux derrière ses iris. Le tableau se coloriera avec le temps, les nuances viendront au fil des mois : c'est déjà notre chef d'oeuvre, ce quatrième enfant, c'est déjà une nouvelle raison pour nous de rester unis.

@Elda Sloane
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Ces gestes, ils les connaissent par cœur. Ces quelques instants suspendus pendant lesquels le gynécologue cherche à capter les battements d’un cœur, également. La musique la plus douce à leurs oreilles, la vie qui s’éveille une fois de plus au sein de leur cocon familial, un peu fissuré ces derniers mois, pourtant toujours aussi fort. Il est simplement différent, un papa et une maman qui s’aiment toujours, mais qui vivent chacun de leur côté, Un amour différent, pas celui qu’on lit dans les contes de fée où les comédies romantiques, pas moins fort pour autant. Ça se ressent dans l’étreinte de leur main au moment de découvrir ce son si unique et pourtant universel. Ça se lit dans ce baiser qu’il pose sur son front, tradition qui les a suivi depuis la naissance de leur premier enfant. Et ça vibrera tout aussi fort, elle en est persuadée, dans la chambre d’accouchement quand les cris de ce nouveau né perceront le silence insolent de la naissance.
À la remarque de celui qui sera bientôt son ex-mari, elle ne peut s’empêcher d’éclater de rire. Parce que c’est absurde, qu’on ne peut pas vraiment distinguer son nez sur cette première image un peu floue, qu’ils deviennent à peine un pied – surtout parce que le docteur le leur indique sur l’écran. Elle rit surtout parce qu’une tension s’échappe de ses épaules, la peur de voir ce ventre arrondi et pourtant vide, l’angoisse de découvrir que quelque chose ne va pas qui s’envole. La sonde continue à se balader, le foetus est encore timide, bouge assez peu, pas vraiment encore autonome pour décider e ses coups de pieds ou de mains – mais ça viendra, Elda garder encore en mémoire les premiers soubresauts, l’étonnement de sentir quelque chose qui vibre en elle, puis qui prend de plus en plus de place, jusqu’à pouvoir laisser la main d’Aden dessiner son amour de l’autre côté du ventre, suivre le fil de ce contact diffus avec l’être qui pousse de l’autre côté des parois de son utérus. Pouvoir partager un peu de ce qui grandit en elle, de ce qui tape si fort qu’on croirait qu’il aimerait s’échapper plus tôt, voir le monde, cette famille qui ne le lâchera pas des yeux, les cris d’amour et les larmes de bonheur.
Le gynécologue confirme la date prévue pour l’accouchement – joyeux Noël – avant de regarder l’épaisseur de la clarté nucale, recherchant une éventuelle trisomie 13, 18 ou 21. Le couple le sait, il faudra encore attendre les résultats de la prise de sang pour connaître les risques exacts, mais ça donne une première valeur rassurante. Cependant, cette fois c’est rassurant, même si d’après ce qu’il voit il n’y a pas lieu de s’inquiéter, cette grossesse est plus tardive que les autres et il souhaite qu’ils prennent rendez-vous pour une amniocentèse, un est plus invasif, mais qui lui offrira un meilleur aperçu des risques. C’est étrange d’être ainsi prise en compte différemment, mais elle a confiance en son médecin – tout pour leur bébé, de toute manière, ils n’hésiteront jamais là-dessus.

L’instrument se balade quelques instants encore, leur montrant leur enfant sous différents angles, quelques clichés qui s’enregistrent dans la machine et qui seront ensuite imprimé. C’est étrange de se dire que, cette fois, il faudra couper les photos entre eux ; deux pour le frigo d’Aden, deux pour celui d’Elda. Habituellement, ils étaient toujours réunis, figurant entre une liste de courses et un gribouillage des aînés… Cette fois la saveur de ces images a un goût un peu différent.
Le sexe lui, ne peut pas encore être connu, la grossesse est encore trop récente et ça ne serait qu’une approximation. De toute manière, le gynécologue se doute un peu de ce que diront les parents, pour la forme leur pose tout de même la question de savoir s’ils désireront le connaître à la prochaine échographie. Ça lui permettra également de s’ajuster à cette envie, de tourner l’écran au moment où l’on pourrait voir ce qui doit rester encore surprise.

– On attend la naissance, répond-t-elle.

Ils l’avaient fait aussi pour les autres, préférant garder ça en eux. Après tout l’enfant sera genre selon son sexe bien assez souvent après sa naissance, subissant les stéréotypes plus ou moins contraignant, ne se reconnaissant parfois pas dans cette binarité ou le genre qui lui sera assigné. Alors ciel peut bien garder ça encore pour d’lui, conserver ce secret et simplement prendre le temps de grandir. L’important est de naître en bonne santé, tout le reste est secondaire à leurs yeux de parents.
Enfin, l’examen est terminé. Elda relâche la main d’Aden pour essuyer le liquide épais sur son ventre. Il a un peu coulé sur son pantalon, mais tant pis ; elle sait de toute manière que ça ne tache pas plus que de l’eau. Avec délicatesse, elle se relève, garde l’équilibre pour ne pas choir de la table d’observation et retrouver les chaises en face du bureau. Le médecin lui prescrit encore quelques vitamines avant de les laisser rejoindre son secrétaire, pour les contrôles d’usage – poids, pression, urine, sang. Elle devient presque une habituée de ce petit jeu à, retrouve vite ses marques. Elle peut ensuite rejoindre son futur-ancie-époux, saluer une dernière fois le docteur et repartir le cœur plus léger et avec les premières photos de leur quatrième enfant.
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