Le Deal du moment :
LEGODAYS : 20% sur une sélection de LEGO avec ...
Voir le deal


Ma vie suspendue (Barbie)

W
H
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Le problème c'est que Lieb, plus il cause, plus il s'enfonce.
Et le trou semble sans fin... impensable, c'est vrai, de lui faire une telle proposition quand on sait que c'est parce qu'il conduisait à l'époque que le mari lui a été arraché des mains. Imbécile, il le pense aussitôt après avoir entendu les mots lui échapper. Les lèvres serrées, dans une grimace qui n'a rien de rassurante. Il voudrait remonter le temps de quelques secondes... à peine quelques graines dans le sablier, pour retirer ses mots mais il sait que c'est impossible. Il avait déjà négocié à plusieurs reprises Chronos mais ce dernier était resté muet à ses suppliques.
Pas étonnant que le ton change une fois encore.
Pas étonnant non plus que s'installent dans les iris concurrents un voile sombre de cynisme. Me conduire, ça suffit à ébranler encore une fois toutes ses certitudes. C'est qu'il veut bien faire, Lieb. Il veut aider, il veut soulager, il voudrait pouvoir écrire un nouveau chapitre mais chacun de ses pas le ramène invariablement à hier, quand la lumière s'est éteinte sur l'univers et qu'il lui a tout fait perdre. Putain Lieb, réfléchis un instant, la proposition, en plus d'être culottée, est complètement hors sol. Quand l'autre fait le tour de lui même deux fois en frappant son front de la main gauche, il prend conscience de tout ce non-sens. Les mots sont les armes que projettent une vérité cruelle : on peut pas être amis, non, c'est impossible. Peu importe ce que Lieb fera ou tentera de faire, il restera à jamais la Mort sous sa forme la plus concrète. Faucheuse malgré lui... lui qui n'a jamais aspiré qu'à une vie tranquille, loin de tous problèmes. Alors l'index se pose sur sa cage thoracique et la transperce, Lieb arrête de respirer.
Le ton est plus doux, c'est presqu'un murmure mais ça suinte la moquerie, ça pue le cynisme. Il ravale sa fierté avec peine, un goût de vomi dans la bouche. Il sent son coeur battre à tout rompre contre le doigt qui le pointe telle une arme. Il vacillerait presque, une flamme secouée par des vents abyssaux. Il lève les deux mains en l'air, Lieb, signe de soumission complète. Il recule d'un pas comme pour se dégager de l'index tueur. Ok, j'suis un connard. qu'il dit, sans sourire, sans même avoir l'air de se moquer, non.. il est sincère, à ce stade, toutes les injures ne semblent même pas être à la hauteur de l'image qu'il perçoit dans son propre reflet tous les matins. Excuse-moi. qu'il ajoute, encore une fois. Tu sais quoi... j'vais disparaître, ça vaux mieux. T'as d'autres choses à faire que de m'écouter dire d'la merde. il recule encore d'un pas. Les badauds sont pleurnichards, c'est vrai, ils voudraient bien entendre la suite mais le ton est retombé aussi vite qu'il était monté. Lieb attrape une nouvelle cigarette dans son paquet, la coince entre ses lèvres. L'estomac gronde, fort, le besoin d'alcool qui s'invite, s'impose, il tourne la tête à gauche, puis à droite avant de plonger à nouveau ses iris dans ceux de l'homme qui lui fait face. Je vais retourner d'où je viens et me faire oublier. Tu n'as pas besoin de moi pour aller mieux, surtout pas. Je suis désolé, vraiment... j'ai cru que la vie m'envoyait un signe, je me suis gouré. Sur le trottoir, il fait mine de pointer du doigt la direction qu'il compte prendre. Moi, je pars par là, t'as qu'à aller de l'autre côté, c'est ce qu'il semble insinuer. Pourtant, il ne bouge pas, pas tout de suite.
T'espères quoi Lieb ? Qu'il te retienne ?
L'utopie réside dans le fait qu'à présent, il ait plus que jamais besoin de lui pour avancer. Coincé entre deux feux, le cul entre deux chaises. Avant, il y avait la mort, après, c'est pareil. Mais s'il acceptait de l'écouter, de lui laisser une chance de l'aider, il y aurait sans doute l'espoir ou l'illusion que tout ça pourrait évoluer, changer... il finit par secouer la tête en soupirant. Désolé pour tout ça... il précise en avançant droit devant lui, jetant un dernier coup d'oeil au passage, lui frôlant l'épaule de la sienne, prêt à s'enfoncer dans la foule et disparaître, enfin. C'est ce que t'aurais dû faire dès le début.
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Il se sentirait presque Minotaure, l'âme brisée, l'impression de tourmenter plus que de raison le type qui lui fait face. Dans ses yeux, océans de désespoirs, l'épiderme brûlant, sous la pulpe de son doigt. Le coeur bat vite, il bat fort, le type est en stress, l'angoisse qui monte probablement à chaque mot doucereux soupiré. Et puis il baisse la tête, les regards sont rompus, Barbie perd son emprise en même temps qu'il se dévêtit d'un manteau de colère pure, brute, dévastatrice. Pas tout à fait apaisé - le serais-je vraiment un jour ? - mais déjà un peu moins assassin, le doigt retombe, le bras aussi. Pendant quelques secondes, la proximité est terriblement gênante, car affreusement naturelle, pourtant de mythes et légendes connus, jamais un humain n'avait été aussi près de l'incarnation de ses cauchemars. Il voit la tristesse infinie prendre pour avatar le chauffeur de cette nuit-là, les larmes au bord des yeux, et déjà elles tarissent, sont sèches. Pendant combien de nuits est-ce que tu as pleuré en même temps que moi ? Les mêmes canaux de larmes sous les mêmes joues exposées à la même lune. Pas le même chagrin, dissonance unique. Pas la même portée, évidemment, pas les mêmes draps froissés sous l'impulsion d'une main esseulée qui cherche la présence de l'être aimé. Pas le même abandon, pas la même tendance à la destruction. Les destins brisés, émiettés, et il en reste quelques miettes justement le long des cils de Lieb quand il relève les yeux, parle tout bas, trop bas pour que Barbara réellement entende. Mais il n'entend plus depuis une minute déjà, écoute plutôt, un peu plus concentré. Le type claudique dans ses paroles comme dans ses gestes, les mains hésitantes, le pas l'est aussi, il dit qu'il s'en va, attend sans doute que le rideau se ferme, que les comédiens s'embrassent ou s'enlacent, en coulisses. Pas possible, non. Barbara lui tourne le dos un peu plus, le laisse avancer, le sent s'interrompre, son regard qui pèse sur la nuque, les poils qui s'hérissent, flammes qui lèchent l'épiderme entièrement. Pendant combien de temps tu vas me faire passer pour l'érinye ici ? Il secoue la tête, se demande ce qu'il doit faire. Le poursuivre, furie à l'assaut, l'affubler de toujours plus de noms d'oiseaux jusqu'à ce qu'il supplie le repos ? L’expier de ses pêches, lui souffler qu'on entend qu'il est désolé, qu'on ne peut le pardonner mais qu'on ne peut pas non plus le détester ? Foutue charité. Il hésite encore, fait deux pas, percute des silhouettes sans trop comprendre comment la rue déserte s'est recouverte d'une nuée de passants. Et puis il frappe de plein fouet quelqu'un de plus grand, quelqu'un de plus fort, les épaules tiraillées, le monde entier semble aller dans l'autre sens, comme une inondation de peaux et de mouvements, il nage à contre-courant. Je vais couler, me noyer dans la masse. Il n'est pas petit, pourtant, mais c'est comme si le ciel s'était couvert de clavicules étrangères, comme si le monde était devenu vêtements d'inconnus, parfums écoeurants qui lui saisissent le nez, les tripes, et il se sent minuscule. La pression du monde en trois points qui pèsent sur le haut de son dos, c'est chaud, froid en même temps, très lourd, comme un exercice physique terrible, et finalement, il fait demi-tour, rejoint les bancs de poissons, les écailles frétillantes de ces passants qui passent trop vite, il est à bout de souffle, frôle l'angoisse, crise d'anxiété, les pensées vont vite, les mots plus encore, il peste, tente de calmer sa respiration, mais on le pousse, on le chagrine, tout va toujours plus vite, plus fort, et il hoquète presque. J’ai besoin de ta main. Pourquoi t'es parti ? Curieuses circonstances ; c'est de son départ que sont nées les frayeurs, boîte de Pandore atomique ; c'est de son arrivée qu'a accouché l'anxiété d'une solution, mains entremêlées qui calment tout. Les deux s'annulent, et le laissent seul, pantin à ses angoisses qui aurait envie de hurler pour se vider d'un peu de la terreur qui paralyse ses poumons et ses mains. Il se mord les lèvres jusqu'au sang, percute une nouvelle silhouette, reconnaît les cheveux du chauffeur au loin, comme un phare dans une mer de corps qui menacent de l'écraser ; alors il le rattrape, dans un geste désespéré, s'accroche à son bras. Chagrin pour chagrin, hein ? À bout de souffle, il ne parvient pas à se calmer, se contente juste de serrer plus fort sur la peau de l'autre, à travers les vêtements, pose sa tête contre les omoplates. C’est intime, trop intime, mais qu'y a-t-il de plus intime que le dernier soupir partagé, que d'avoir été les deux âmes assistant à l'évaporation d'une troisième ? Tête enfouie dans la veste de l'autre, Barbara n'entend plus rien, ne voit plus rien, le monde vire au noir, et ça le calme ; foutue sortie des bureaux, ça a failli le tuer pour de bon. Pourtant, quand il lève enfin le menton, retrouve une respiration apaisée... Il n'y a personne. Que nous. Où sont-ils passés, les requins, les murènes, les baleineaux ?
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Il te retiendra pas, la certitude le frappe en plein vol. Cette fois ça y est, les ailes sont brûlées, le soleil aura eu raison d'Icare et l'homme tombe. Chute vertigineuse, à tel point qu'il pourrait en vomir s'il s'écoutait. Alors il s'en va, tête baissée, chagrin assumé. Il pourrait chialer mais son corps est vide. Vide d'eau, vide de sens, vide de vie tout simplement. Il glisse une main dans la poche de son jean, l'autre s'accroche à la cigarette sur laquelle il tire avec abnégation. Tue moi, foutu cancer, au fond, c'est tout ce qu'il souhaite, tout ce qu'il espère. A vivre dans l'excès, il n'en attend pas moins le trépa. Ils peuvent pas comprendre, personne ne peut l'entendre. Brûler la mèche par les deux bouts, on le lui répète souvent mais Lieb fait exprès. Je cours vers elle, c'est ce qu'il voudrait dire. Mort certaine, on le lui reproche tous les jours. Il s'en moque, Lieb, c'est ce qu'il veut, ce qu'il espère. Alors tranquillement, marche lente et maladroite, il avance, dépasse l'homme alors que leur épaule se frôle. Dernier contact, comme un adieu. Il ne se retourne pas, se retient de faire marche arrière et de l'affronter encore. J'ai pas envie de m'en aller qu'il voudrait lui dire mais il n'en fait rien. T'as besoin que je m'efface, il l'a bien entendu, bien compris.
Et puis ça s'passe trop vite autour de lui.
Agoraphobie nouvelle, celle qu'il n'éprouvait pas avant mais qui s'est manifesté presque tout de suite après l'accident. La foule, il ne la supporte plus. Sensible à ça, il a l'sentiment que le monde se remplit d'un coup et qu'il se noie. Autour de lui, les gens accélèrent le pas et se démultiplient. La solitude lui échappe, on la lui arrache. On le bouscule d'un coup d'épaule, on lui marche sur le pied... j'suis pas encore mort, sinon, on le traverserait sans même le voir. On lui lance des regards froids, on lui reproche sa démarche hésitante mais il s'en moque, il ne presse pas le pas. Là où tout le monde se précipite vers son quotidien, lui le laisse s'échapper sans même tenter de le rattraper. Il lève les yeux rapidement, fixe un point dans le vide et s'y accroche. Ne sombre pas qu'il s'entend penser. T'es un glaçon dans un verre plein, balloté d'un côté à l'autre mais il ne coule pas. Il serre les dents, crache la fumée et se contente d'avancer.
Et à nouveau, le temps se fige.
Une pression sur son bras, différente, ferme et puissante. La main l'arrête net, comme l'aiguille au sommet du cadran. Il sait ce qu'il se passe avant même de le comprendre. Quelqu'un se brusque contre lui, une tête se cale dans son dos, entre ses omoplates et un souffle s'écrase sur son dos. La main ne quitte pas le bras et, comme mû par un appel silencieux, Lieb s'arrête et se dresse, fort, dans la foule. Les jambes tremblent un peu mais le torse reste solide. La foule se heurte encore autour de lui comme le courant d'une rivière mais rapidement, l'eau s'épuise et le calme revient. Il est là, trempé de sueur et d'appréhension mais il ne bronche pas. Il laisse s'échapper quelques instants avant de prononcer, à voix basse ; La foule s'est dispersée, tu n'as plus rien à craindre. sans même se retourner. Non, je ne te ferai pas l'affront de croire que je t'ai sauvé la vie alors qu'il n'a fait que la lui briser. Non, il ne se retourne pas par respect, parce qu'il sait pertinemment que s'il s'est accroché à son dos, ce n'était qu'instinct de survie, rien de plus. Ni pardon, ni rédemption. Il se contente d'ajouter doucement Moi non plus, je ne la supporte plus. et si tu n'étais pas réapparu, j'aurais pu me laisser entraîner qu'il voudrait ajouter.
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Emportés par la foule qui nous traîne, nous entraîne, écrasés l'un contre l'autre, nous ne formons qu'un seul corps
Il reprend son souffle, l'imbibe de ces odeurs inconnues qui sont pourtant si terriblement familières ; de cette nuit-là Barbie a gardé tous les souvenirs, toutes les couleurs, la moindre lueur de Lune glissée sur un bout du béton mouillé, flaque-mare qui se la joue miroir de Sélène. Il se souvient de chaque visage dépassé par la voiture avant l'impact. Et avec le temps, au bout d'un an et demi, les traits commencent à fondre, à devenir davantage de petites étincelles avant la grande flambée, celle qui a carbonisé coeurs et corps. Je l'entends battre, ton coeur. C’est une drôle de sensation, c'est étrange, parce qu'il avait senti le rythme cardiaque à travers son doigt pointé, accusation pernicieuse, sur le torse du chauffeur ; mais le sentir et l'entendre étaient bien différents. Pendant quelques secondes, alors que les vagues les tourmentaient, Barbara hésita à s'accrocher de ses bras aussi, à les enrouler autour du rocher de substitution, le récif seul capable de le protéger face aux intempéries. Il sentait, contre sa peau, celle de Lieb, et puis ses frissons, et puis ses accélérations cardiaques, le palpitant qui s'emballait sans que l'amoureux éparpillé ne puisse savoir si ces arythmies lui étaient dues, avec cette soudaine apparition bien trop curieuse, ou si lui aussi avait peur de ces bancs de poissons multicolores qui les dépassaient en menaçant d'emporter chaque os. Les yeux fermés, une main plaquée sur l'oreille gauche, Barbara attendait la fin des déflagrations corporelles. Il détestait ce quartier, il détestait cette heure, il détestait souvent encore plus les New-Yorkais. S’il devait être honnête, il faudrait aussi qu'il avoue que je n'ai pas aimé grand-chose depuis cette nuit-là. À voix basse, on lui murmure la formule salvatrice, mais l'autre ne bouge pas, peut-être s'est-il vraiment transformé en roc (peut-être que je suis devenu Méduse), et puis non, son coeur bat trop vite, trop fort, ce n'est pas un homme rocher, c'est un homme blessé qui n'ose pas se retourner de peur de se prendre une nouvelle gifle. Et du bout des lèvres, nouvelle confession, Barbie l'entend non pas de la voix portée à ses tympans, mais uniquement à sa résonance dans le corps de l'autre, dont il se détache enfin, conscient d'y être resté un peu trop longtemps. Je ne m'étais pas enveloppé dans la chaleur depuis trop de combats. Double oppression qui soulève le coeur, porte la bile aux lippes ; trop similaires, il commence à le penser, trop similaires et pourtant il a tout fait pour haïr complètement ce type, était même résigné à le détester encore il y a quelques minutes. Trop similaires dans le chagrin, trop similaires dans le deuil, dans la destruction portée à bout de bras, comme pour construire un autel à leur propre effacement. Il relâche le bras de Lieb avec un peu de retard, décide aussi de ne pas lui faire face, pas pour l'instant, pas tant qu'il a le nez qui coule (désolé pour ta veste), pas tant qu'il a les yeux rouges, pas tant qu'il a l'impression encore d'être gibier en agonie. "À chaque fois que je sors, je suis sûr que c'est passé. Parce que je croise un groupe de trois, quatre personnes, et puis je n'angoisse pas. J’suis débile de continuer à croire que ça passera un jour." Et puis doigts qui glissent, le long de sa cuisse, pour essuyer un peu de la moiteur, phalanges qui caressent celles du chauffeur, groupe en approche, plus court, moins semblable à un gros nuage d'orage mais il attrape ses doigts quand même. Je voulais te frapper il y a vingt secondes, et maintenant j'ai besoin que tu me donnes la main. Curieux psyché humain, curieuse brume dans laquelle il s'est enlisé, il voudrait comprendre, cherche à comprendre, cherche à se reprendre aussi, parce qu'il se déteste d'avoir besoin de ça, de sa chaleur, même s'il sait que tout est lié à cette nuit-là. Quand il a perdu son phare, qu'il n'a eu pour seule ampoule lointaine, seul regard familier, que celui qui était à l'origine de la déchéance. Peut-être qu'il aime se faire mal, aussi. ou bien peut-être justement qu'il en a marre, de s'endolorir. "Je te déteste plus que tout au monde. Je ne comprends pas pourquoi j'ai voulu te retrouver." Car ce n'était pas le jeu que de la foule, il y avait aussi l'éclair dans les yeux quand la silhouette était apparue, et ça le fait sangloter de nouveau, presque, mais en silence, pour ne pas surtout se baigner de tendresse ; il ne comprend pas, il est perdu, s'en veut, se perd un peu plus chaque seconde dans des forêts de détestation et des envies d'attention.
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Si j'peux te sauver, alors je te sauve, c'est la seule chose à laquelle il pense lorsqu'il le sent se serrer contre lui. Si j'peux soulager ta peine, je le ferai, c'est inscrit en lui dès l'instant où leurs yeux se sont croisés, quelques minutes plus tôt. J'ferai tout pour que tu te sentes mieux sans savoir si c'est légitime de le penser, de le vouloir. Je t'ai brisé alors quelque part, c'est peut-être le meilleur moyen de rééquilibrer les choses. Il ne bronche pas, Lieb, se fait même mur impénétrable et inébranlable pour lui. Il affronte ses propres angoisses si ça peut l'aider à se sentir en sécurité. Il ferme les yeux, un court instant, parce qu'il a l'sentiment que tout ça est irréel, comme s'il ne le vivait pas vraiment. Pourtant il est là, dans mon dos, il sent son corps qui se brusque contre le sien et la chaleur de son derme par-dessus les vêtements qu'il porte. Une présence aussi étrange que réconfortante, comme si elle était familière. Leur bonheur, cette nuit-là, je l'ai envié c'est vrai. Il s'en souvient, il n'a jamais oublié. Ce qu'il avait vu dans leurs yeux, ce qu'il avait perçu dans cette complicité si injustement abrégée. Ils étaient tout ce qu'il n'était plus depuis que son couple s'effaçait, depuis que sa mère était revenue et avait emporté avec elle tous ces morceaux de lui... j'avais désiré ce qu'ils étaient si fort, si ardemment que le sentir prostré contre lui, à présent, le fait presque rougir.
La foule s'écarte, doucement, docilement. Il ouvre les yeux, reprend son souffle doucement. Il cherche une certaine stabilité sur ses jambes alors qu'il parle tout bas. Il ne se retourne pas, refuse l'affrontement parce qu'il le sait dans une position vulnérable qui ne ferait qu'alimenter la haine qu'il ressent à son égard. Il a passé les dix dernières minutes à lui faire comprendre combien il le détestait... Lieb sait qu'il ne supporterait pas d'avoir à admettre qu'il a eu besoin de lui, si soudainement. Besoin est un terme trop fort, sans nul doute, mais qui effleure l'esprit du chauffeur et le rassure un peu. Destins liés, croisés, conjuguées, ça lui semble justifié, désormais. Puise ta force chez moi, si tu en as besoin, il soulèvera des montagnes pour lui... mais pourquoi ? Parce cette culpabilité s'est logée quelque part dans son corps et qu'elle refuse de s'en aller. Un an et demi de regrets, d'amertume auront eu raison du chauffeur. Aujourd'hui, il n'est rien de ce qu'il était et ce geste, aussi indu soit-il, lui donne soudainement satisfaction d'exister à nouveau. La voix de l'autre est aussi douce que la sienne, les mots sont employés avec parcimonie. Monceaux d'honnêteté partagés, échangés. Lieb sourit dans le vide, très peu. Il termine sa cigarette en silence, l'écoute sans mot dire. Il voudrait dire que ça passera un jour mais il a appris à ses dépens que ça ne serait sans doute que ranimer l'agacement, la colère et la haine. Alors il ne dit rien.
Un nouveau groupe s'approche, comme l'eau d'un barrage qui rompt et s'écoule par flots. L'homme enlace ses doigts, un geste anodin mais particulièrement grisant pour Lieb qui se laisse faire en silence. Les doigts s'emmêlent, sans doute que les coeurs aussi, un peu. Il se mord la lèvre, se laisse guider tout en observant le groupe disparaître à nouveau. Les mots de l'homme sont sans appel... j'ai voulu te retrouver, ça l'ébranle. Légers tremblements dans la jambe droite, tendue, pourtant ancrée à terre. Il ne se retourne toujours pas, incapable d'affronter le regard sévère. La parenthèse est douce mais la bulle est fine.. il réfléchit un court instant, cherche ses mots. Ne pas l'effrayer, ne pas l'énerver. Je voudrais t'apporter des réponses mais je n'en sais rien. il serre ses doigts, presse sa paume. Il aime ce contact, il aime la chaleur qui s'en dégage. Il retient l'instant, aussi longtemps que ça pourra durer. Il se mord l'intérieur de la joue, précise Je peux m'en aller, si c'est plus simple pour toi... la proposition est fausse, il ne le veux pas et même s'il le pourrait, il s'en sent incapable. Il l'a fait une première fois et l'a regretté aussitôt. Il refuse de mettre un terme à tout ça, même si ça n'a plus aucun sens désormais. Il sent l'homme près de lui, il ressent le derme de sa main dans la sienne et pour première fois depuis longtemps, il se sent vivant.
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Qu’il fait mal, ce simple contact, cette simple friction brûlante de peaux et d'âmes qui s'enlisent en s'arrimant l'une à l'autre ! Il n’y a que des groupes de passants, que des troupes d'esprits en peine qui vivent leur journée, et pourtant ça semble la fin du monde à Barbara. Il sent les odeurs, entend les discussions, les pas, ils sont lourds, ils résonnent sur le béton, et sa respiration s'est accélérée seule, avant qu'il ne réfugie sa bouche sur le tissu de la veste de l'autre. Ambivalence folle, quand quelques minutes avant il aurait voulu mordre le derme, lui faire mal, juste pour voir si la souffrance du coupable pouvait lui apporter un peu de réconfort. Mais il est là, maintenant ; dépassé par les ombres qui accourent, pressent le pas, il s'est réfugié contre le seul rocher trouvable à l'horizon. Qui de mieux pour me protéger que celui qui sait tuer ? Pensée sordide qui traverse l'esprit, il s'en veut presque aussitôt, se mord l'intérieur des joues, serre plus fort la main de Lieb. Ses mots résonnent à travers la cage thoracique, et puis Barbie entend les battements de coeur, ils se sont accélérés, il sent aussi la jambe droite vibrer, inquiète, tiraillée, et la sienne s'emballerait presque aussi pour l'imiter. Est-ce que c'est le fait que tu sois mon miroir qui m'a poussé à venir vers toi, à franchir la mer de jambes à bout de bras ? Curieuses manches reflets, alors qu'il s'agrippe justement à la sienne d'une main libre, l'autre toujours accrochée à sa pair. Il l'écoute parler sans rien dire, ne peut pas vraiment savoir si la situation est juste ou non, perturbé par un flot ininterrompu de pensées. Il se rappelle les gros titres des journaux, à la mort de Seth. L’héritier de l'empire Arnauld qui perd son âme soeur. Une nouvelle fondation ébranlée dans la maison Arnauld. Les funérailles bien trop médiatisées ; Seth n'avait été qu'un caméraman discret, qui détestait les grandes effusions. Il aurait détesté son enterrement, aurait détesté qu'on tire ainsi le portrait de toute la famille Arnauld, tour à tour. Il aurait détesté voir mon visage souillé des vestiges de sa disparition. Les yeux gonflés pendant des mois, le corps à fleur de peau et puis toujours l'air manquant, les sanglots qui se multipliant, hydres de Lerne, sans jamais s'arrêter, le conduisant à se demander s'il avait été doublement maudit, cette nuit-là, s'il avait fait quelque chose à quelqu'un de trop bien placé, qui lui aurait lancé une sale incantation. Et puis l'autre propose de partir, et ça fait frémir Barbara, qui s'imagine déjà seul dans une mer d'encre, entouré de requins et de créatures inconnues. Combien le dévisageront, combien reconnaîtront dans les traits fatigués celui qui les faisait rire, gamins, quand ils étaient devant la télé ? Combien y trouveront la même image que celle qui avait fait les couvertures des magazines people, la gueule endeuillée, le visage lourd de mille poids qu'il devait porter seul ? "Non, attends, pas tout de suite, je..." Je m'étouffe dans ta veste, je m'inhibe de ton odeur pour chasser celle du béton, celle de la peur, je veux rester planté en toi, je pense que tu me dois bien ça, je trouve que tu es fort, je pense que tu peux m'apprendre à le redevenir, je t'en veux énormément, je te déteste viscéralement, je suis persuadé que j'irais mieux si je ne t'avais pas croisé, je serais perdu si je ne t'avais pas trouvé. "J’ai besoin de toi, là. s'il te plaît." réprime un sanglot dans le tissu, hésiterait presque à se moucher encore, se reprend, se contente juste d'enfouir plus profondément le nez entre les omoplates, alors que les mains s'arriment toutes deux à leurs consoeurs, cette fois, corps presque en fusion. Fusion d'étoiles, fusion de galaxies, fusion malsaine, peut-être soufflera-t-on, mais fusion nécessaire, parce qu'elle fait taire peur et angoisse.

Nous ne formons qu'un seul corps,
et le flot sans effort nous pousse, enchaînés l'un et l'autre
et nous laisse tous deux épanouis,
enivrés et heureux
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


La bile qui lui monte à la bouche, menace de faire tout exploser alors qu'il fait de son mieux pour articuler des mots qui n'ont aucun sens. Pourtant il s'y raccroche, s'y accroche même. Lui se tient toujours fermement contre son dos, la tête brusquée entre ses omoplates. Respiration saccadée qu'il parvient à ressentir à travers l'épais tissu du blouson qu'il porte. Les gens continuent d'avancer, pourtant le cliché est loufoque, improbable. Le temps s'écoule à une vitesse différente pour lui, sa main qui tient fermement celle de l'autre avec l'intime conviction que s'il le lâche, il se perdra à son tour. Tout lui paraît si grand désormais, comme s'il n'était qu'un grain de sable pris dans la tempête. Il voudrait pouvoir calmer blessures et douleurs mais comment apprivoiser un homme qui, dix minutes plus tôt, aurait tout donné pour vous écraser sous ses semelles. Il respire mal, hésite sur les mots à employer. Ne veut plus faire de bourde, ne veut plus blesser, juste réconforter.

J'suis pas assez fort pour ça,
J'suis pas assez fort pour toi.

Il ferme les yeux, reste concentré. Tout n'est question plus que de volonté. Ployé sous le vent n'est plus une option, s'il faut se montrer solide, c'est maintenant... pas demain. Pourtant l'appel est là, au fond de lui. Insidieux, pervers... un grondement sourd qui le ramène à ses propres démons. Tu vas craquer, ça se répète en boucle dans sa tête. Si tu bois pas, tu vas craquer, alors il se concentre, ignore les sirènes alléchantes qui grondent un peu partout autour de lui. Là où le monde ne tourne plus rond, il n'y a ni pardon, ni rédemption. Il propose un repli stratégique mais l'autre insiste. J'ai besoin de toi, ça le crève. Flèche tirée en plein coeur alors que les quatres mains se serrent, se conjuguent et dansent un ballet que personne ne peut comprendre. Il inspire, expire. Les soubresauts sont tels que sa poitrine se soulève par accoups. Tu vas craquer, il n'a pas le droit, pas maintenant. Il fronce les sourcils, se concentre sur cette présence chaude dans son dos.

Là où les eaux se mêlent
Là où se finit la terre
Là où est si grand le ciel
Là où se bat la mer

Il presse ses paumes dans les siennes. Je... je vais me retourner. il annonce, tranquillement. Il laisse le temps pour que l'information soit digérée et comprise avant d'amorcer le premier geste. Il lâche une main, presse sur son talon et se retourne délicatement. C'est pas plus d'une seconde, c'est une éternité. Il lui fait face, de toute sa hauteur. A peine quelques centimètres mais c'est suffisant pour le protéger du vent. Ok... maintenant, je vais t'enlacer. comme un chirurgien explique les gestes au patient, il fait preuve d'empathie, de tendresse et de douceur. Il écarte un bras, puis l'autre, s'avance d'un pas pour rompre la faible distance qui séparait les corps et l'attire contre lui tendrement. Une main au sommet du dos, l'autre plus en bas. Il laisse sa tête se glisser sur son épaule et pose la sienne sur ses cheveux. L'odeur se répand en lui, partout, instinctivement. Une chaleur qui s'imprègne, s'insinue et émane du corps. Au loin, un néon qui grésille et l'envie délirante d'y courir. Il ferme les yeux, concentre toi putain, et presse son corps contre le sien. Respire doucement, je suis là. quelle ironie, n'est-ce pas ?
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


C’est murmuré, c'est incandescent, les mots gravés à même la peau, et pourtant Barbara n'ose pas rouvrir les yeux. Lieb n'a pas promis davantage de monstres, n'a pas invoqué une horde de créatures malfaisantes qui répandrait leurs sortilèges à l'oreille de l'amoureux brisé, et pourtant il n'ose pas rouvrir les yeux, il est figé, il n’ose pas rouvrir les yeux, et ça tourne en boucle, la respiration s'affole à nouveau, et s'il se trouvait être l'un d'entre eux, être un monstre, finalement, s'il s'était lui aussi amusé à se déguiser, à prendre l'enveloppe d'un humain. Après tout, n'était-ce pas lui l'empereur démon qui avait convié les Enfers cette nuit-là ? Barbie réprime un frisson, il sent les mots qui se posent le long de sa mâchoire, oisillons aux plumes qui le piquent un peu trop, sans doute faites de fer, bien taillées, et puis il sent les bras qui s'enroulent, qui l'entourent, sorte de reptiles qui le couvrent de leurs écailles. Pour me protéger ou pour finir le travail déjà bien entamé ? Il ne sait plus, n'ose toujours pas rouvrir les yeux, se sent à la fois proie, ternie, fragile, instable, et prédateur. Les mots brûlants au bord des lèvres qui pourraient en déborder, brûler à l'acide le blouson de l'autre, y effacer pour de bon la trace des larmes qui se sont échappées. Odeurs qui viennent en tornades, ravagent les narines, quand il sent les effluves de cette soirée-là.

Avant cela, j'ignorais que le crépuscule de ma vie
avait un parfum.


Il sent son coeur accélérer, l'angoisse revenir, il suffoque dans le blouson du chauffeur de taxis, car tout soudain le ramène un an et demi en arrière. Avait-il regardé sa nuque, assis derrière lui, ce soir-là ? Avait-il vraiment noté son prénom avant de le voir dans autant de procès verbaux ? Non, peut-être qu'il n'avait pas prêté attention à Lieb du tout. Peut-être qu'il s'était concentré uniquement sur son bonheur iridescent, sur les mains lâchées avant de monter en voiture, sur la légère discorde qui s'était mise à flotter, spectre flippant écarté des souvenirs. Il avait tout fait pour oublier la moindre pensée négative, s'était concentré uniquement sur la douleur, sur cette destruction d'avenir et des entrailles, sur l'annihilation complète et sans équivoque de toutes les romances passées, actuelles et à venir. Avant toi, j'étais capable d'aimer. Et puis, c’est trop. La bouilloire siffle, son crâne explose de chaleur. "Je... Putain... Je... Lâche-moi, merde !" Il se détache avec violence, à bout de souffle, a l'impression qu'il a essayé de l'étouffer contre lui, de l'étouffer sous des mots doux, de l'étouffer sous trop de souvenirs, sous trop d'attentions. Et il se tient face à lui, d'abord droit, puis penché, les mains sur les genoux, le dos courbé, regard vissé sur le sol. Tentant de retrouver un peu d'air, rien que quelques brises, le corps entier secoué par les vrombissements de son horreur. Il ferme les yeux, penche la tête, fait des ronds de nuque, comme pour chasser au loin le stress, l'angoisse, cette foutue maîtresse qu'il a depuis trop de mois et qui s'amuse à le tourmenter. Ça prend près d'une minute avant qu'il ne relève la tête, qu'il se risque à poser ses yeux sur l'autre, quitte à y voir du dégoût, de la colère, de l'incompréhension. Je m'en fiche, écorche-moi à nouveau s'il le faut. "Tout ça c'est... C’est..." Le doigt qui fait des cercles à côté des tempes, mime silencieux, mot qui se devine trop facilement. "C’est pas bien, c'est malsain, c'est vraiment... Pourquoi tu me laisses faire ça ? Pourquoi t'es resté là, pourquoi tu..." Les questions affluent trop vite, et il a avancé, s'est rapproché, à nouveau soleils qui se fondent l'un en l'autre, mains qui se frôleraient presque, et il ne comprend pas pourquoi c'est si intense.

Est-ce que c'est ça, mourir ?
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité

Un court instant de répit, comme une pause. Une parenthèse tranquille, bercée par le silence d'une rue pourtant pleine et auréolée de leur deux souffles qui se conjuguent. Une pause, une accalmie utopique dans laquelle Lieb n'est plus le meurtrier mais l'ami. Tout du moins, quelque chose qui s'en rapproche. Il ferme les yeux, tente de le rassurer et de calmer ses angoisses mais il sait, Lieb, que la tempête fait rage. Pas normal, malsain, il y pense, bien sûr. Cette situation n'est pas sensée leur arriver. Pourtant, l'homme est entre ses bras. Son corps cambré contre le sien et la chaleur qu'éprouve Lieb presque irréelle, bien qu'elle lui apparaisse presque comme un affront au bonheur qu'il avait observer en voyeur dans le rétroviseur.
Le temps reprend sa course.
La parenthèse est fermée.
La bulle éclate.
Le mouvement est brusque mais Lieb est projeté vers l'arrière. L'autre s'affaisse à nouveau sous le poids d'un vent qu'il est le seul à ressentir. Le chauffeur retient son souffle, prêt à encaisser les coups, à nouveau. Il sent la colère, l'agacement mais au-delà de ces sentiments, il ressent aussi l'incertitude et les doutes, l'incompréhension la plus totale face aux récents événements. L'homme pose ses mains sur ses genoux, difficilement, reprend son souffle comme s'il s'était perdu dans une course folle. Lieb reste muet, impassible. L'écoute et prend sur lui. C'est malsain, comme une réponse en écho à ses propres pensées.

Bien sûr que c'est malsain,
pourtant, j'étais bien.


Il ne sourit pas, n'esquisse aucun geste ni même n'articule un mot. Il laisse faire, tout simplement. L'homme s'avance à nouveau, se redresse. Dieu qu'il est grand, ou dieu seul sait combien Lieb se sent infime. Il ne recule pourtant pas, loin de se sentir menacé. Ce n'est plus de l'arrogance, ce n'est même plus des menaces... c'est juste le désespoir. Celui qui les étreint depuis tout c'temps, différemment mais pourtant similaire. Lieb le comprend mieux que l'autre, visiblement. La même peine sous un visage différent. Lui pleure un être disparu quand Lieb chiale sur une vie arrachée. Au fond, on est les mêmes, et c'est sans doute pour ça que l'approche a été différente, que le besoin irrationnel de se rapprocher les a poussé à se réconforter, se rassurer. Déjà, la chaleur de son corps qui lui manque, comme si l'oxygène lui manquait. Le manque, cruel et viscéral qui se fait ressentir jusqu'au plus profond de ses entrailles.

Si tu me laisses partir maintenant,
je vais me perdre, c'est une évidence.
Retiens moi comme on retient la nuit,
si tu m'laisses partir, je crève.


Il passe une main derrière sa tête, mal à l'aise. Les mains sont si proches, les corps aussi. Lieb n'amorce aucun geste qui pourrait l'effrayer ou le pousser à se révolter plus encore. Dans les iris de l'autre, il ne lit que la douleur de tout ce qu'il ne comprend pas... elle fait écho à la mienne, il serre les dents. Il ravale difficilement un sanglot, là où il voudrait bien pleurer son corps semble s'y opposer. Alors je m'en vais. qu'il dit, tout simplement. Les membres tremblent, les muscles bandent. Il recule d'un pas, puis d'un second, sans jamais le quitter des yeux. Retiens moi, mais il ne prononce rien de plus qu'un pauvre Excuse-moi. en secouant la tête de gauche à droite.
Invité
avatar
Messages
Rp posté(s)

   
Invité


Torse qui se soulève, à bout de souffle de nouveau, comme s'il était inacceptable de ne pas se faire balayer par des tempêtes singulières toutes les trente secondes. Albatros aux ailes enlisées, aux plumes cassées, il a du mal à voir l'horizon, sans trop en savoir la raison. Peut-être que tous mes horizons ont fané avec le bouquet du mariage, qu'ils se sont asséchés, jusqu'à disparaître ? Peut-être que tous ses horizons ont disparu en même temps que les premières secondes du choc, ce soir-là, eux-mêmes évaporés par la chaleur du trauma. Ou bien peut-être que tous mes horizons se cachent derrière ce type-là, ses larges épaules, qu'il m'obstrue la vue, à rester ainsi devant moi ? Il a envie de crier en silence, de pleurer sur les joues arides, de voir la rue s'inonder d'un fleuve lacrymal, et il a envie, Barbie, que Lieb disparaisse, il voudrait le pousser, le balayer d'une avenue à une autre, le faire se fracasser le myocarde comme il avait pulvérisé le sien, contre un lampadaire ou contre la carcasse d'une voiture. Violence inouïe qui ne lui est pas propre, qui agite un peu plus encore sa respiration, il n'y a plus de bancs de requins pour le chasser dans d'autres océans, pour le noyer sous les coraux, il n'y a plus de foule à la vie en rose dont les épines viendraient lui tirailler le derme, et pourtant, il sent l'angoisse monter. Il la sent grimper le long de ses côtes, c'est fulgurant, c'est douloureux, ça remplace l'air et ça remplace même la vie, ça remplace le ciel azur qui devient gris.
Recette maudite ; quelques éclats électriques entre leurs doigts qui se frôlent presque, quelques millimètres seulement entre leurs torses qui se touchent, une poignée d'air qui se mélange à leurs respirations, trio entremêlé, un bon décalitre de leurs émotions qui se déversent dans la rue, côtoient le béton et s'affrontent en s'embrassant, luttent en s'embrasant. C’est de tes mains qu'est né mon malheur, et c'est de mes lèvres que le tien est en train de germer. Il se déteste, Barbara, à jouer les bourreaux comme ça, à enfiler ce foutu déguisement de sale connard au coeur détruit, à épouser cette foutue ambition de rétamer tous les autres palpitants qu'il aura un jour rencontré. Il se hait, fort, si fort qu'il sent dans ses paumes les petites-lunes carmin apparaître, sous la pression de ses ongles. Un voile devant les yeux, une disparition assumée de l'esprit, quelques instants, et le monde tremble, il sent le bitume se dérober sous ses pieds, il se sent projeté dans une crevasse, sent que les roches chaudes lui aiguisent la peau, lui arrachent peu à peu le fond d'air qu'il avait. Mais il reste droit, idole de tous les avatars de tristesse, incarnation d'Achlys, bien droit, le dos qui ne laisse voir que la courbe dessinée par un fin rai de soleil. Il reste droit, fixe, immobile, toise en silence, alors que dans sa tête c'est la cacophonie, fanfare qui s'accentue, qui déchire tout, qui brave tout… Alors même que les sanglots de l'autre commencent à jouer les percussions, que des instruments de bois naquiront quelques larmes qu'il devine à peine. Il sent la tristesse, il sent le désarroi, il sent même la lente agonie de tous les bons sens, et ça lui donne envie d'hurler, de convier les autres fauves à la fête. Ça lui donne envie de toucher la peau de l'autre, pour sentir le coeur battre, pour s'en servir comme d'un scanner, pour retrouver la surface, pour sortir de la fissure. Mais l'autre, il s'en va. il disparait, en quelques pas, du champ trouble.
Androïde désarticulé qui reste là, fixe, dans la rue, qui ne bouge pas.
Androïde désarticulé aux pas mécaniques qui ne peut pas poursuivre, qui ne peut pas chasser.
Androïde désarticulé qui rentre dans le premier bar venu, se réfugie dans les toilettes, s'enferme dans une cabine dont la porte claque fort, trop fort, et puis pleure chaudement, pleure bruyamment.

Même si ça tambourine. Même si ça l'implore. Il reste prostré là, les minutes passées qui se ressentent secondes, déjà tout oublié si ce n'est le chagrin, lourd, infini, la sensation d'être à la fois traître et trahi, et les mains qui touchent le sol humide, sale.
Messages
Rp posté(s)

   
Contenu sponsorisé