TW : morts, cimetière, créatures
cinquante trois minutes. c’est l’temps qu’il t’a fallu pour mettre en place les préparatifs du rituel que t’as prévu de réaliser pour asseoir ton statut de grand sorcier auprès d’carmin. comme un gamin impatient d’organiser la fête d’halloween la plus sensas' de l'année, les mouvements guidés par l’euphorie. la demande formulée la veille a suscité en toi une excitation pathétique morbide et totalement déplacée. t’as poussé le vice à un niveau dépassant l’entendement, remettant en question l’équilibre de ton esprit. tu mets en scène cette farce ridicule comme si t’avais la double casquette réal - acteur d’un film d’horreur, dans lequel le grand gourou capable d’implorer les morts s’apprête à claquer une malédiction dans la gueule d’un bâtard. et c’est sans doute ça en vérité, qui t’motive autant. pouvoir exprimer ta créativité comme sur un plateau de tournage, sans les directives soufflées. tu donnes toujours tout c’que t’as jairo, quand tes talents d’artiste sont en jeu. même s’il n’y a personne pour juger de ta prestation, excepté ce pauvre et naïf carmin qui deviendra ton partenaire à son insu. le sac à dos soigneusement rempli d’un tas de merdes visant à l’embobiner, t’as eu qu’à entrer “comment jeter un mauvais sort” dans la barre de recherche google pour trouver ton bonheur. une mine d’or de conseils occultes, de mises en garde flippantes, du bullshit à ne plus en finir qui t’as fait gausser un paquet d’fois. t’as même consulté en ligne la bible de la magie noire, un genre de grimoire à la soeurs halliwell. un exercice bien plus amusant que celui que t’avais dû accomplir pour la majorité des personnages incarnés jusqu’à maintenant. t’as rien fait d’aussi divertissant depuis un bail, les innombrables soirées passées à t’remplir l’estomac de liqueurs amères ne générant que lassitude, souffrance et remords. la dernière fois que t’as éprouvé un tel frisson, était probablement en grattant la porte de ton voisin du d’ssous prêt à refermer ta sale mâchoire autour de son cou, planter les crocs dans la jugulaire. à croire que y’a rien de plus grisant pour toi que d’exploiter la candeur, duper les confiants. ceux qui ont le malheur de croire en toi un peu trop fort. et ça vaudrait probablement trois ans de thérapie, pour briser ce schéma cruel où mentir te galvanise. mais carmin a dit qu’un mensonge pour rire se pardonnait, alors t’éprouves pas la moindre culpabilité de la mascarade grandeur nature que t’entretiens depuis plusieurs mois. au pire, ce s’ra pas la première fois que tu beugleras à l’injustice après un dos tourné pour ne plus être la victime de tes méfaits. toutes tes conneries et tes erreurs, provoquant systématiquement un abandon que tu dénonces après, l’air étonné. agissant comme si tu n’l’avais pas mérité, t’offusquant de cette suite de disparitions. c’est jamais pour blesser pourtant, c’est pas ça le plus important ?
tu patientes tapi dans la pénombre, dissimulé derrière les grilles en ferraille installées pour dissuader les intrus de s’incruster au-delà des heures d’ouverture. too bad, t’as jamais été bon pour respecter les règles jairo, pour courber l’échine et te ratatiner une fois la lumière en pleine figure. t’as plus grand chose à perdre de toute façon, d’être découvert en train de piller la tombe d’un macchabée. ils penseront que t’as touché l’fond, que t’es devenu complètement timbré, que t’as vrillé d’avoir perdu toute ta superbe, ta jolie réputation. et peut-être que c’est vrai. capuche sombre rabattue sur le crâne, tour de cou relevé sur le nez, y’a que tes deux billes visibles qui scrutent l’obscurité à travers les barreaux. tu restes là plusieurs minutes sans esquisser le moindre mouvement, bien plus patient que c’que les gens imaginent généralement. tu pourrais tenir des heures jairo, à l’attendre dans le silence. et y’a que quand tu distingues une silhouette s’approcher de la localisation exacte envoyée par sms, que tu fais passer tes bras à travers pour toucher le corps qui erre près de la frontière interdite, en poussant une sorte de grognement que tu veux celui d’un zombie tout droit extirpé d’sa tombe. un truc flippant et dégueulasse.
@Carmin Sinclair