((OOTB)) tu suis les directives, les pas du russe devant toi, portière ouverte. tu trouves ça bizarre, les pensées gardées pour toi. tu l’imaginais pas conduire, plutôt s’faire transporter à toute heure du jour et de la nuit par un homme de main. comme toi, quand t’avais du pognon. un autre mystère qui dénote avec l’image que tu t’es faite de lui, dans la même veine que son attachement insoupçonné à la famille. le cul installé sur le siège, ton crâne se plaque contre la vitre pendant que la carlingue de métal se fraie un chemin dans la circulation new-yorkaise. ce silence peu habituel, trahit l’effervescence de la cervelle à l’approche du lieu de l’expérimentation qu’il t’impose. fair enough, c’est certainement le minimum avant d’confier un tas de came entre les mains d’un type qu’il ne connaît pas. pire, d’un type qu’il n’a pas franchement en estime. peu importe, tu comptes bien écouler son stock en un temps record et rentrer chez toi avec un nouveau boulot. conseil communiqué avant de stopper le véhicule, te fait esquisser un sourire complaisant. "t’inquiètes le colosse, j’suis pas un débutant dans c’domaine." ta vie entière érigée sur les fondations bancales des apparences, t’as parfaitement conscience d’avoir une gueule en ta faveur qui t’permet de gratter tout un tas d’avantages. te mêler au gratin, faire la conversation, les séduire, les encourager à te céder une partie de leur richesse, constitue ton quotidien depuis suffisamment longtemps pour que t’excelles dans cet exercice. c’est pas la première fois que tu refiles de la drogue en soirée, tes petites sauteries toujours généreuses en poudre blanche et cachetons. mais t’as rarement demandé des billets en échange, la coutume d’intégrer ce présent au sein de l’invitation. all inclusive, le meilleur service de new-york. jairo, t’as toujours su recevoir. ce club en particulier, tu l’as déjà fréquenté. pas ton préféré. coke sniffé sur la cuvette des chiottes, tu t’étais fait sortir au bout de deux heures après avoir vidé une bouteille de champagne sur un coincé du cul qui s’était foutu d’toi parce que t’avais pas reconnu vivaldi. t’espères que suffisamment d’temps s’est écoulé depuis ta dernière apparition, mais t’imagines que tu bénéfices de toute manière d’un passe droit en t’pointant en compagnie du gorille. "j’en connais aussi un rayon sur la vie idyllique." blague. en c’moment, la tienne s’apparente davantage à une lente agonie, ponctuée d’ennui, d’humiliations, d’ablation de rein et de tentatives désespérées de renouer avec d’anciennes amitiés.
t’es planté là jairo, les billes sombres qui scrutent ton environnement pendant de longues minutes où l’on pourrait t’imaginer complètement largué. t’enregistres les visages, les attitudes, les boissons, certaines identités que tu connais déjà. tu serpentes entre les participants, écoutes des bribes de conversation. verre rempli dérobé sur un coin de table pour avoir l’air occupé, tu prends le temps d’étudier les alentours. la période d’observation passée, tu te diriges vers ta première proie. le fils d’un élu, dont l’père fait partie de la campagne du tien. déjà assisté à tes beuveries, n’a jamais rappelé après le coma. tu comptes sur le sentiment de culpabilité et le malaise que tu perçois immédiatement au moment où tu l’abordes pour en faire ton point d’entrée. parce que c’con là n’est pas le dernier pour se remplir les narines et les veines d’un doux nectar destructeur. il te confiera tout ce que tu dois savoir pour bazarder la merde du ruskov vitesse grand v, te présentera les personnes nécessaires. des éclats de rire, des conversations futiles, des sourires coulants, tu joues un grand spectacle. et tu n’sais pas bien si ça t’a foutrement manqué, ou si ça t’donne juste l’envie de gerber. probablement un peu des deux. tu disparais de temps en temps, dans des coins isolés en compagnie de quelques abrutis à la recherche d’un frisson. tu ne t’arrêtes pas avant d’avoir vidé la marchandise, le corps qui retrouve finalement l’observateur. une heure et quarante-sept minutes. t'as aucune idée de si le score est minable ou honorable. "c’est tout ? j’m’attendais à un peu plus de challenge." tu fais l’malin jairo, mais tu vas bientôt te retrouver à cours de clients à qui refourguer sa came. alors t’espères en réalité qu’il ne va pas t’en refiler une fournée. "j’prends combien moi, sur les transactions ?" tu vas droit au but, parce qu’on n’va pas se mentir, y’a que ça qui t’intéresse.
@Vadim Kuznetzov